L’Anthroposophie et Rudolf Steiner

Rudolf Steiner est né 25 février 1861 en Croatie dans l’Empire austro-hongrois ; il est mort le 30 mars 1925 à Dornach, en Suisse. Philosophe, et occultiste[1], membre de la société théosophique[2], il s’intéressa aux œuvres de Goethe puis de Nietzsche. Il est le fondateur en 1913 de l’anthroposophie, qu’il qualifie de « chemin de connaissance », visant à « restaurer le lien entre l’Homme et les mondes spirituels ». Il se présentait comme un guide spirituel doué de pouvoirs médiumniques (clairvoyance).

Cependant, bien qu’il cite des philosophes, les écrits de Steiner n’ont rien de philosophiques. Ses affirmations péremptoires ne procèdent pas d’un raisonnement logique. En 1905, Rudolf Steiner fréquente les obédiences maçonniques, notamment celles qui s’intéresse plus particulièrement aux sciences occultes telle que l’Ordre Memphis-Misraïm[3], sous l’égide de John Yarker qui avait succédé à Garibaldi (il en sera le grand hiérophante, c’est-à-dire chef mondial de ce rite). Steiner œuvre avec Marie von Sivers, durant une décennie à restaurer le cérémonial cultuel et symbolique, basé sur une supposée tradition de la sagesse ancienne, dont les fondements se trouvent partiellement dans l’ouvrage Dogme et Rituel de Haute Magie d’Éliphas Lévi. Il fonde ainsi son propre Rite initiatique : la franc-maçonnerie ésotérique, à laquelle Édouard Schuré aurait été initié. Parallèlement, Steiner devient le dirigeant du Rite de Memphis-Misraïm[4] très implanté en Allemagne et en Italie. Steiner aurait aussi été initié dans l’Ordre de la Rose-Croix ésotérique fondé par Franz Hartmann (1838-1921) médecin allemand, théosophe, occultiste, géomancien, astrologue et auteur d’ouvrages ésotériques.

Rudolph Steiner est à l’origine de projets aussi divers que les écoles Waldorf, l’agriculture biodynamique, la médecine anthroposophique avec ses médicaments et produits cosmétiques Weleda, la Communauté des Chrétiens, la banque la NEF.

Doctrine anthroposophique

L’anthroposophie se fonde sur l’affirmation de la possibilité de dépasser la vision matérialiste de la nature et du monde, en cultivant des niveaux suprasensibles de l’âme et de l’esprit. Selon Rudolf Steiner : « L’interprétation correcte du mot « anthroposophie » n’est pas « sagesse de l’homme », mais « conscience de son humanité, c’est-à-dire : éduquer sa volonté, cultiver la connaissance, vivre le destin de son temps afin de donner à son âme une orientation de conscience, une Sophia. [5] »

L’anthroposophie cherche à développer en l’homme les forces nécessaires pour appréhender ce qui existerait au-delà des sens : monde éthérique ou monde des forces formatrices, monde psychique ou astral, monde spirituel.

L’entité du Christ joue un rôle central dans l’Anthroposophie, et pourtant l’anthroposophie ne se conçoit pas comme une religion[6], alors que de fait, elle voudrait se substituer ou transcender toutes les religions, en se prétendant avoir la connaissance suprême.

Partant de ce qu’elle nomme Science Spirituelle (les Anthroposophes aiment les majuscules), l’anthroposophie propose dans tous les domaines de l’existence des applications pratiques qui se veulent en harmonie avec la nature profonde de l’homme : en politique (le mouvement pour la triarticulation de l’organisme social), en matière d’éducation (écoles Waldorf), médecine anthroposophique, en thérapies artistiques (eurythmie), en pharmacie, en agriculture biodynamique, en économie, en vie sociale, en arts, etc.

Les débuts de la Société anthroposophique

Tout commence par une histoire rocambolesque. À l’Assemblée générale de 1909 à Adyar, les responsables de la Société théosophique, Annie Besant et C.W. Leadbeater, déclarèrent qu’Alcyone, le futur Jiddu Krishnamurti, alors âgé de 13 ans, était le Christ réincarné. Rudolph Steiner n’était pas d’accord avec cette vision. Il fut exclu de la société théosophique et avec d’autres membres dissidents allemands, il fonda la Société Anthroposophique Universelle ainsi que l’École libre de science de l’esprit dont il devient le président.

Très prolixe, Rudolf Steiner fit plus de 6 000 conférences dont une partie fut publiée. Il écrivit une trentaine de livres. L’édition allemande compte environ 370 volumes. Une partie de son œuvre a été traduite en français. De nombreux cycles de conférences ont pour thématique la réincarnation et le karma.

La Société Anthroposophique Universelle, en tant que telle, compte en 2008 un peu plus de 50 000 membres, dont 1 300 adhérents en France. Mais beaucoup plus nombreux sont ceux qui gravitent autour d’elle. La Société Anthroposophique ne fait pas de propagande ni de prosélytisme direct, mais la doctrine se propage par l’agriculture biodynamique, la médecine anthroposophique, les écoles Waldorf, les produits Demeter…

L’anthroposophie propose un chemin de développement spirituel

Alors que pour percevoir le monde sensible, nous avons besoin des cinq sens, Steiner professe que pour appréhender les mondes suprasensibles, nous aurions besoin d’organes suprasensibles, notamment les chakras. Ces organes se seraient fossilisés permettant ainsi de développer la conscience de soi, mais ils resteraient actifs chez les peuples primitifs capables d’une médiumnité naturelle. Les Occidentaux auraient eu cette clairvoyance instinctive jusqu’au Moyen Âge. Grâce aux exercices de méditations et à l’enseignement de Steiner, ces organes de perception seraient développés et réactivés. Rudolf Steiner professe cela dans son livre : L’initiation ou comment parvenir à des Connaissances sur les Mondes supérieurs ? » Il s’agit pour lui d’une véritable Science de l’Occulte. L’adepte parviendrait ainsi à une clairvoyance consciente remplaçant et surpassant l’antique clairvoyance instinctive. Cet enseignement ésotérique, caché jusque-là, parviendrait à la connaissance du plus grand nombre grâce à Rudolf Steiner. Il insiste surtout sur le développement du chakra à douze pétales (chakra du cœur) qui permettrait de passer du registre intellectuel au registre spirituel.

Les croyances anthroposophiques

L’Anthroposophie est un syncrétisme complexe et abscons, mélangeant divers éléments de l’Hindouisme, du Christianisme et du Bouddhisme, associé à un discours pseudo-philosophique, pseudo-épistémologique et pseudo-humaniste sorti tout droit des phantasmes magico occultes de Rudolf Steiner.

Ces croyances sont bien entendu incompatibles avec la foi chrétienne et il est difficile de comprendre que des pasteurs protestants aient pu faire appel à Steiner et adhérer à de telles conceptions.

Ainsi la croyance en la loi du karma et de la réincarnation s’oppose à la Foi en la Résurrection.

La croyance en l’existence de « grands initiés » guidant le développement de l’humanité (Bouddha, Manès, Christian Rose-Croix, Scytianos, Rudolf Steiner) et la croyance en la possibilité de développer une pensée pure ouvrant l’accès au monde spirituel est en contradiction avec l’esprit des Béatitudes.

La croyance en l’influence des signes du zodiaque sur les hommes et sur les plantes est un relent de paganisme.

La croyance aux chakras, la croyance aux auras est incompatible avec une anthropologie chrétienne.

La croyance en la possibilité de devenir clairvoyant et de développer trois degrés de cette clairvoyance : imagination, inspiration et intuition, par la pratique régulière des méditations anthroposophiques, ou même la lecture des œuvres de Steiner, est une déviance grave de la pratique de la méditation chrétienne qui ne vise aucun pouvoir, mais une conformité de plus en plus grande à faire la volonté de Notre Père.

Voici un catalogue à la Prévert des croyances distillées comme des certitudes par la Science de l’Esprit de Steiner. Le Christ est descendu du Soleil, Bouddha s’est réincarné sur Mars, planète liquide ! La lune est faite de corne vitrifiée, le cosmos s’arrête à Saturne, ce sont les Gnomes qui font pousser les plantes, la Résurrection du Fils de Dieu aurait engendré le phénomène de la radioactivité, l’Atlantide n’est pas un mythe, mais un continent où les hommes avaient des corps cartilagineux capables de s’étendre à volonté, les blonds ont une intelligence cosmique, les dinosaures étaient en fait des dragons cracheurs de feu, les Africains pensent avec leur cerveau-arrière, l’organe sexuel du futur sera le larynx, tricoter développe de bonnes dents, les hommes et même la Terre se réincarnent, et enfin, ce sont les dieux qui ont révélé à Steiner les principes de la pédagogie Waldorf. Nous aurions pu ajouter une très longue liste d’inepties de ce genre.

Première école Waldorf

Appliquant la pédagogie de Rudolf Steiner, la première école Waldorf vit le jour en 1919 à Stuttgart. Initialement, c’était une école d’entreprise principalement destinée aux enfants des ouvriers de la fabrique de cigarettes Waldorf-Astoria. Les écoles Waldorf sont aussi appelées Écoles Steiner. De 1919 à 1924, Rudolf Steiner donna 15 cycles de conférences, développant les bases d’une pédagogie issue de sa compréhension spirituelle de l’être humain. Les écoles Waldorf prétendent ne pas enseigner l’anthroposophie, cependant la pédagogie et la finalité de l’enseignement reposent sur des bases données par Steiner qui conduisent toutes aux conceptions anthroposophiques.

Cela apparaît notamment très clairement dans l’une de ses déclarations aux professeurs de la première école Steiner-Waldorf de Stuttgart :

« Au sein du corps des professeurs, nous devons toujours retenir que nous, les hommes, ne sommes pas là pour nous-mêmes, mais pour réaliser les plans divins sur le monde. Gardons en conscience le fait que, lorsque nous accomplissons telle ou telle chose, nous réalisons en fait les intentions des dieux, que nous sommes, en quelque sorte, les réceptacles destinés à réaliser les courants qui viennent d’en haut et veulent devenir réalité dans le monde. [7] »

Aujourd’hui il y a plus de 800 écoles Waldorf à travers le monde.

La Communauté des Chrétiens

Elle se développe dès 1922 à Dornach avec l’ambition de rénover la pratique religieuse chrétienne. De jeunes théologiens s’adressèrent au pasteur protestant Friedrich Rittelmeyer (1872-1938), alors membre de la Société Anthroposophique à Berlin. Ce dernier se tourna alors vers Rudolf Steiner pour lui demander conseil sur la manière de féconder le domaine cultuel religieux à partir des conceptions anthroposophiques. Rudolf Steiner accéda à cette demande et organisa deux cours à l’intention de ces théologiens à Stuttgart et à Dornach. Rittelmeyer devint le premier recteur de ce « mouvement de rénovation religieuse » dont le centre s’établit à Stuttgart.

Alors que la Société Anthroposophique, son École de Science de l’Esprit, et Communauté des Chrétiens se prétendent indépendantes, il y a des liens étroits entre ses membres directeurs quand ils ne sont pas les mêmes.

Le premier office de ce culte initié par Steiner a été célébré au Goetheanum, au siège même de la Société Anthroposophique Universelle !

Si la Communauté des Chrétiens n’était pas, selon le mouvement, l’Église des Anthroposophes liés, alors pourquoi toutes les conférences, sermons et propos religieux tenus par les prêtres et dirigeants de cette institution s’appuieraient-ils systématiquement sur des références à l’Anthroposophie de Rudolf Steiner, qu’elles soient citées explicitement ou implicitement ?

Un fondement doctrinal plus anthroposophique que chrétien

La Communauté des Chrétiens prétend vénérer principalement la figure du Christ et se baser sur la Bible. Mais le Christ des anthroposophes n’est pas Celui des évangiles, c’est un être conçu cosmique lié au Soleil.

En réalité les sacrements de l’Église catholique sont plagiés par la Communauté des Chrétiens. Les prêtres de la Communauté des Chrétiens s’appuient sur les enseignements occultistes de Steiner et non sur la Bible.

« Steiner a réécrit lui-même la messe et a donné des directives sur ce que devait être la marche de l’institution ecclésiastique, avec un rituel d’ordination des prêtres, une hiérarchie montant aux niveaux nationaux jusqu’à des « Recteurs », etc. C’est une véritable église nouvelle avec pour fondement la doctrine anthroposophique que Rudolf Steiner a conçue ! [8] »

« Par exemple, lors de la « Communion », on entendra parler du fait que le Corps du Christ doit être salutaire pour les « forces formatrices » du communiant. Or ces termes sont une autre façon de désigner ce que les anthroposophes appellent le « corps éthérique », ou « corps vital », ou « corps de forces formatrices ». De même, lors de la Transsubstantiation, on remarquera qu’il est question de : « ma pensée pure », « mon cœur aimant » et de « ma volonté qui se donne ». Ces désignations reprennent très précisément la nomenclature et la doctrine anthroposophique selon laquelle l’Homme est tripartite, c’est-à-dire composé de la « pensée », des « sentiments » et de la « volonté ».

Ou encore, il est question de « cycles terrestres », termes faisant référence aux petites et aux grandes « rondes » de la Chronique de l’Akasha de Rudolf Steiner, ou encore aux « périodes » de sa Science de l’Occulte, c’est-à-dire à une conception du monde occulte selon laquelle le temps est composé de séquences temporelles ayant des unités spécifiques, se répétant. »[9]

« Cette construction du culte de la Communauté des Chrétiens à partir des références à la doctrine de Rudolf Steiner est particulièrement sensible avec les « Épîtres ». Ces dernières sont en effet des textes lus au début et la fin de chaque office. Elles s’éloignent du texte canonique de la messe traditionnelle, pour évoquer des événements du cycle naturel de l’année. Par exemple, il existe une Épître pour la saison hivernale (Épître de l’Avent), une Épître pour le début de l’Été (appelée « Épître de la saint Jean ») une Épître pour l’Automne (appelée « Épître de la Saint Michel »), une Épître du Printemps (appelée « Épître de Pâques »)… L’Épître de la Saint Jean est entièrement bâtie sur une dévotion à la lumière et au soleil estival, l’Épître de l’Avent est construite sémantiquement sur le crépuscule hivernal, à ce moment de l’année où les jours raccourcissent, l’Épître de Pâques sur les phénomènes atmosphériques et lumineux propres à cette saison… Cette insistance sur le vécu des saisons est typiquement anthroposophique : il doit être mis en relation directe avec le fameux Calendrier de l’Âme de Rudolf Steiner, un recueil de strophes mantriques où le gourou associe des états d’âme particuliers à des impressions liées à certains moments précis du cycle annuel. [10] »

La médecine anthroposophique

Ses bases reposent sur des cycles de conférences données à la demande d’une trentaine de médecins et sur le livre de Ita Wegman, médecin hollandais (1876-1943), Données de base pour un élargissement de l’art de guérir selon les connaissances de la science spirituelle… Ita Wegman fonda en 1921, à Arlesheim, en Suisse, la première clinique anthroposophique, appelée actuellement Ita Wegman Klinik.

Pour la médecine anthroposophique, une mauvaise santé, reflète souvent l’aboutissement d’une « destinée karmique ». Steiner enseignait que les maladies avaient des causes spirituelles. Ainsi quelqu’un qui naît avec des impuretés spirituelles causées par des péchés et des erreurs commises lors de ses vies antérieures, purgerait le mal somato spirituels contractés lors de précédentes incarnations. La médecine classique pourrait bloquer le processus d’auto guérison karmique du patient par des médications pharmacologiques ou chirurgicales invasives.

Steiner était contre les vaccins. « En vaccinant, nous accomplissons simplement quelque chose que la personne devrait produire elle-même en contrepartie dans une réincarnation prochaine. [11] »

En médecine anthroposophique la phytothérapie et l’homéopathie, les élixirs de Bach[12], les produits dynamisés selon les principes de Steiner sont préférentiellement prescrits.

Aucune validation scientifique selon les critères de la médecine n’a apporté le moindre début de preuve de l’efficacité de la médecine anthroposophique.

L’agriculture biodynamique

Elle a pris naissance en Allemagne, à la demande d’agriculteurs. Rudolf Steiner donna un seul cycle de 8 conférences sur le sujet en juin 1924 à Koberwitz (Silésie). Les méthodes de l’agro biodynamie n’ont rien à voir avec l’agriculture biologique pratiquée habituellement.

En effet l’agriculture biodynamique se base sur les influences astrales des signes du Zodiaque, sur des procédés magiques consistant à tuer et à brûler certains animaux en dispersant leurs cendres sur les champs durant la nuit pour éloigner la vermine, sur des rites consistant à pratiquer certaines méditations pour entrer en contact avec les « âmes-groupes » des animaux pour leur demander leur coopération invisible, sur des incantations, sur l’utilisation de cornes de vaches remplies de substances diverses remuées en imprimant au liquide la forme d’une lemniscate, cornes que l’on enfouit ensuite dans le sol, comme autant de capteurs d’énergies spirituelles pour réaliser des « préparations biodynamiques ».

Voici quelques extraits choisis particulièrement truculents du Chapitre 4 : Théorie du fumier spirituel du livre Cosmos, de Michel Onfray[13].

J’aime le vin et si j’avais pu boire une seule fois dans ma vie un bon flacon conçu selon les principes de l’agriculture biodynamique, je ne me serais pas interdit la philosophie de Rudolf Steiner, car sa pensée aurait été validée par ses produits. Hélas, je n’ai jamais bu de vin issu de la biodynamie qui ne soit une exécrable piquette…

Je compris que ce vin avait moins à voir avec le raisin qu’avec l’idéologie et qu’il procédait d’une croyance qui lui donnait sa loi. La biodynamie est une pensée magique qui, comme toute pensée magique, dont la psychanalyse, produit des effets chez ceux qui y croient. Ce vin imbuvable par un amateur de vin devient le nectar le plus fameux pour un palais qui a renoncé à ses papilles au profit du catéchisme formulé en 1924 par l’ésotériste Rudolf Steiner dans un ouvrage intitulé « Agriculture. Fondements spirituels de la méthode biodynamique ». Le vin biodynamique est un genre de vin de messe : il ne donne d’extase qu’aux croyants. Rudolf Steiner (1861-1925) est un pur produit de l’idéalisme allemand qui débouche clairement dans l’occultisme, l’ésotérisme.

Il semblerait que, sur la planète, 2 700 fermes se réclament aujourd’hui de l’agriculture biodynamique et que 92 000 hectares de terres agricoles soient dévolus à cette pratique. Un label, Demeter, certifie les produits obtenus en biodynamie et, en France, un autre label fort opportunément nommé Biodyvin (!) garantit lui aussi les produits obtenus avec la méthode de Rudolf Steiner. Ce dernier label français est issu du Syndicat international des vignerons en agriculture biodynamique.

Cette théorie biodynamique se double d’une pratique que Rudolf Steiner détaille dans une conférence le 12 juin 1924 : il s’agit de fabriquer un « fumier spirituel » appelé à régénérer, féconder, nourrir le sous-sol, donc le sol, à partir de pratiques qui, pour ma part, me font plutôt sourire ou rire. Steiner y conserve l’idée chère à Samuel Hahnemann, l’inventeur de l’homéopathie, de petites dilutions sublimées par une pratique du vortex dans un rituel qui convoque la bouse et la corne de vache dans un concentré de pensée magique.

Voici la recette : trouver des cornes en choisissant des vaches du lieu, car « les forces des cornes provenant d’autres bêtes étrangères au pays peuvent entrer en conflit avec les forces attachées à la terre de ce pays » ; peu importe leur âge, pourvu qu’elles ne soient pas trop jeunes, pas trop vieilles non plus ; ne craignant pas la contradiction, répondant aux questions des paysans, Steiner dit qu’on pourra les réutiliser trois ou quatre fois, mais exige des cornes « aussi fraîches que possible » ; on évitera les cornes de bœuf ou de taureau, seule la vache est licite ; elles devront faire entre 30 et 40 centimètres ; si l’on veut réutiliser les cornes, on les placera dans une caisse dont les côtés seront rembourrés avec de la tourbe. Si l’on devait utiliser du fumier de cheval dans une corne de vache, il faudrait alors prendre soin de l’entourer avec des crins du cheval.

Ensuite : bourrer la corne du fumier de la vache ; l’hiver, l’enterrer dans un sol ad hoc, pas trop sablonneux, entre 50 et 75 centimètres, ainsi, écrit Steiner, « nous conservons dans celle-ci les forces que la corne de vache avait l’habitude d’exercer à l’intérieur même de la vache, à savoir réfléchir l’éthérique et l’astral » (127) ; cette hivernation permet de vivifier le contenu de la corne ; on obtient donc dans celle-ci une capacité de fertilisation extraordinairement concentrée et vitalisante – Pourquoi ? Comment ? En vertu de quels principes ? Selon quel processus chimique ? Steiner ne le dira pas, il suffit qu’il en offre la formule.

Plus tard, après que le sous-sol a effectué son travail magique, déterrer le tout, sortir le fumier dont l’anthroposophe nous apprend qu’« il ne sent plus du tout », puis il ajoute : « Il y a là des forces énormes tant astrales qu’éthériques. » Diluer ensuite le fumier dans de l’eau : le contenu d’une corne nécessite un demi-seau d’eau et cette quantité suffira pour traiter 1 200 mètres carrés – pourquoi pas 1 000 ou 1 500, on ne le saura pas plus que pour les autres assertions.

Quand le fumier se trouve dans l’eau du seau, il faut remuer en créant un puissant tourbillon qui doit toucher le fond du récipient. Puis, magie, il faut inverser soudainement la rotation pour créer un vortex. Ce travail doit s’effectuer pendant une heure. Steiner explique qu’il vaut mieux éviter la mécanisation de ce geste et préférer l’effectuer à la main, car, en brassant de façon ancestrale, le paysan transmet des informations sur lui-même au contenu de son seau. L’anthroposophe invite à mobiliser les amis ou la famille le dimanche pour transformer ce rituel en plaisir. Une fois obtenu le précieux liquide astral et éthérique, le pulvériser à dose homéopathique (je rappelle : un seau pour 1 200 mètres carrés) sur le sol ainsi régénéré. On obtient des fruits et légumes dignes d’un jardin d’Éden, bien sûr.

L’extravagance de Rudolf Steiner en matière d’agriculture ne s’arrête pas là. Il complète sa théorie du fumier le 13 juin 1924 en affirmant qu’il reprend à son compte les thèses homéopathiques de la grande puissance des petites substances. À cet effet, il parle de « fumure homéopathique ». Il donne six recettes pour tonifier et fortifier le fumier et lui permettre d’obtenir les meilleures grâces de certaines substances nécessaires à l’excellence de l’agriculture biodynamique – potassium, calcium, fer, acide silicique, phosphore.

Pour ce faire, sur le même principe qu’avec la bouse de corne et la silice de corne, Steiner propose des recettes à mi-chemin du rituel de sorcellerie et du canular. Première recette : cueillir des fleurs d’achillée, qui s’avère une plante excellente pour remédier aux maux provoqués par la faiblesse astrale ; sa puissance est telle qu’elle agit du simple fait de sa présence ; mettre sa récolte dans une vessie de cerf que l’on coud – la vessie de cerf est en relation directe avec le cosmos ; pendre ce résultat l’été, à l’air libre, dans un endroit aussi ensoleillé que possible ; la décrocher à l’automne ; l’enterrer l’hiver de façon assez peu profonde ; lorsqu’on la sort de terre, la mélanger à un gros tas de fumier : « Le rayonnement agit », affirme Steiner, en vertu d’une « force de radiation extraordinaire ».

Une fois de plus, la proposition pratique issue des considérations théoriques astrologiques, ésotériques et occultistes confine aux pratiques de sorcellerie, aux rituels de magie, aux recettes de bonne femme prétendument enracinées dans le savoir millénaire des gens de la terre – rappelons que Steiner, théoricien de l’agriculture, qui moque la théorie et vante les mérites du paysan, n’a jamais eu aucun contact personnel et direct avec le travail des champs : il se contentait de penser l’agriculture du fond de son fauteuil.

Un adepte très médiatisé de l’agriculture biodynamique est Pierre Rabhi qui interrogé sur le sujet, affirme qu’il n’est pas anthroposophe. Pourtant, dans son domaine agricole, il organise des stages de Biodynamie, méthode d’agriculture magico-religieuse comme nous venons de le voir. Pierre Rabhi y fut très tôt initié, il le raconte dans son ouvrage intitulé Du Sahara aux Cévennes. De plus, bon nombre de personnalités de son mouvement sont des anthroposophes. Et Pierre Rabhi donne fréquemment des conférences dans des institutions liées à l’Anthroposophie, et les écoles Steiner-Waldorf.

L’eurythmie

Dans les écoles Steiner-Waldorf, on pratique l’Eurythmie, cet « art du mouvement » que Rudolf et Marie Steiner ont inventé. L’Eurythmie est présentée par ses adeptes comme une sorte de danse ou d’expression corporelle permettant une meilleure de prise de conscience personnelle et relationnelle. Pas un mot dans un premier temps n’est dit sur les arrière-plans ésotériques de cette activité scolaire. Pourtant, Rudolf Steiner lui-même disait que l’Eurythmie n’est pas une fille, mais la sœur de l’anthroposophie. L’Eurythmie est une sorte de grammaire gestuelle qui permettrait de rendre corporellement visibles les sonorités de consonnes, de voyelles, et des phonèmes. Cette correspondance parfaitement subjective et suggestive induit dans l’esprit des enfants des gestes codifiés qui sont présentés comme immuables et universels. L’Eurythmie serait en effet, selon les anthroposophes, « le langage de l’invisible rendu visible ». Les sonorités des mots exprimeraient, dans chaque langue, quelque chose de l’essence éternelle de ce qu’il désigne.

En fait, l’Eurythmie se nourrit d’autosuggestion. Lorsque les enfants font les gestes censés représenter la sonorité des mots, l’enseignant leur indique ce qu’ils sont censés ressentir intérieurement. Ainsi, les élèves des écoles Steiner-Waldorf sont accoutumés à s’imaginer qu’ils ressentent effectivement en eux-mêmes telle ou telle chose, alors celles-ci leur ont été suggérées. On fait croire aux élèves qu’ils ont découvert par eux-mêmes, au fond d’eux-mêmes, certaines idées qui, en réalité, ont été implantées dans leur esprit sans qu’ils ne s’en aperçoivent. En anthroposophie une large place est réservée à l’intuition au ressenti, mais les enfants qui ont subi cet enseignement sont de fait formatés jusque dans leur inconscient pour aborder la vie selon les conceptions du maître Steiner. Il est fréquent que les réunions anthroposophiques commencent par quelques gestes d’Eurythmie, avec la consigne que chacun prenne bien conscience de ce qu’il pense et de ce qu’il fait. En réalité l’adepte reproduit les schèmes de pensée qu’on lui a inculqués.

Doctrine sur le corps

Pour Steiner le cœur n’est pas une pompe et le sang circule de son propre chef, grâce à la force vitale qu’il porte en lui[14]. De même, il enseignait que le cerveau n’était pas impliqué dans la connaissance[15]. Pour Steiner, la véritable connaissance était l’exercice de pouvoirs paranormaux rendus possibles quand les individus développaient des « organes de clairvoyance »[16].

Le corps aurait une structure ternaire, corps physique corps éthérique et corps astral.

Le corps physique, partie visible est le seul qui est reconnu et étudié par la science.

Le corps éthérique est pour Steiner à la suite des occultistes le corps vital ou un champ de forces qui permettrait le développement du corps physique et son maintien en forme.

Le corps astral est appelé par Steiner corps psychique, corps de conscience, parfois corps des désirs ou corps animique. Il serait de forme ovoïde et serait perceptible par les clairvoyants qui l’assimilent à l’aura. Ses couleurs varieraient en fonction des climats intérieurs de la personne et de son état de santé.

Le Moi est considéré comme l’entité supérieure immortelle de l’homme, censé agir dans l’âme et susciterait ainsi l’être conscient.

Les corps supérieurs. Le disciple qui suit le chemin spirituel selon Steiner, anticipe par le travail qu’il fait sur lui-même, les stades de conscience qui ne deviendraient l’apanage naturel de l’humanité que dans le futur.

Le travail du Moi sur le corps astral, en le transcendant, donnerait naissance au Soi spirituel.

Le travail du Moi sur le corps éthérique, en le transcendant donnerait naissance à l’Esprit de vie.

Le travail du Moi sur le corps physique, en le transcendant, donnerait naissance à l’Homme-Esprit.

C’est un jargon qui n’a donc rien de philosophique de scientifique ou de théologique, et ne rentre dans aucune catégorie anthropologique.

Les entités dites « adverses »

Le monde invisible serait habité par des entités adverses Lucifer et Ahriman.

Ainsi le Christ cosmique maîtriserait Lucifer et Ahriman dans leur opposition pour maintenir l’équilibre intervenant dans le développement de l’humanité. Les forces lucifériennes auraient une action expansive, centrifuge, dilatoire, dissolvante et calorique, tandis que les forces ahrimaniennes auraient une action contractante, durcissante, centripète et réfrigérante. Selon cette vision, dans l’organisme humain, les forces lucifériennes auraient un certain rapport avec les maladies de type inflammatoire, microbienne, tandis que les forces ahrimaniennes seraient liées aux maladies sclérosantes, paralysantes et virales. La santé résulterait ainsi de l’équilibre dynamique entre ces deux tendances.

Réincarnation et karma

Pour Rudolf Steiner grâce à l’initiation qu’il donne, l’homme trouverait sa propre libération en développant les facultés et le savoir, et ce en progressant d’incarnation en incarnation. Ainsi les corps seraient renouvelés à chaque incarnation. Le karma présiderait à ces réincarnations. Après la mort, l’esprit de l’être humain initié s’élèverait dans les mondes spirituels, aussi haut que lui permettrait son degré d’évolution. Il irait y rencontrer des entités spirituelles, avec lesquels il préparerait sa prochaine incarnation. Enfin prêt, avec des conditions terrestres adéquates, l’esprit humain redescendrait vers la terre.

Les prophéties délirantes de Rudolf Steiner

Voici quelques-uns des innombrables délires de Rudolph Steiner qu’il prophétise de manière péremptoire à un auditoire hypnotisé par sa force de persuasion. Il professe l’incarnation d’Ahriman au début du troisième millénaire, la venue du Maitraya Bouddha, l’apparition du Christ dans le monde éthérique à partir de 1933, l’avènement dans le monde anglo-saxon d’une nouvelle technologie basée sur l’utilisation des forces éthériques pour remplacer le pétrole, la prochaine réincarnation de Manès.

Croyance en la future incarnation d’Ahriman, venant après celle du Christ et de Lucifer (la date n’est jamais précisée clairement et oscille entre un événement imminent ou prévu pour le 3e millénaire) ; ou la « culmination anthroposophique » censée avoir commencé depuis la fin du siècle dernier et marquer le triomphe culturel de l’Anthroposophie ; ou qu’à partir d’une certaine époque l’organe de reproduction de l’être humain ne sera plus le sexe, mais le larynx.

Croyance en l’existence de deux groupes d’âmes élues que Steiner nomme les « Platoniciens » et les « Aristotéliciens ».

Croyance en des rythmes qui viendraient régler l’histoire de l’humanité (comme celui des 33 ans et celui des 666 ans, notamment).

Croyance en une évolution réglée par des cycles régis par le nombre sept.

Croyance en l’existence des continents engloutis de l’Atlantide et de la Lémurie.

Chacune de ces croyances a donné lieu à des développements et des commentaires considérables de la part de Rudolf Steiner et de ses successeurs, dans le but de les présenter comme des vérités de la Science Spirituelle et non précisément comme des croyances.

Au sein de la Société Anthroposophique, la fascination exercée par ces élucubrations sans fondement demeure intacte et est cultivée religieusement.

Les membres de l’École de Science de l’Esprit. « Au-dessus des simples anthroposophes, on trouve ceux qui appartiennent à l’École de Science de l’Esprit, c’est-à-dire les membres de la Société Anthroposophique qui sont admis à écouter les « leçons » de la « classe », c’est-à-dire le culte secret au cours duquel sont lues certaines conférences de Steiner, accompagnées de mantras considérés comme plus particulièrement sacrés, qu’ils auront le devoir de méditer régulièrement et de ne le divulguer à personne. On est accepté à ce niveau après un long entretien avec un « Lecteur de classe », pouvant prendre un caractère très intime.

Les dirigeants. Enfin, pour piloter tout cela existe le Goetheanum, où se trouve le Comité Directeur de la Société Anthroposophique Universelle, ainsi que les différentes Directions des Sections Professionnelles de l’École de Science de l’Esprit. Le Goetheanum n’est pas considéré comme un simple centre administratif, mais comme un véritable temple. Pour s’en rendre compte, il suffit de considérer comment Steiner lui-même a procédé à une sorte de divinisation du premier édifice qu’il avait construit et qui a péri dans les flammes en 1922[17] Certains anthroposophes vont ainsi jusqu’à parler de « Goetheanum céleste », comme il y a une « Jérusalem céleste » dans la Bible…[18] »

Ces dirigeants ont un langage abstrait et incompréhensible peut-être également à eux-mêmes, qui sait ! Ils donnent l’image d’érudits débattant de questions complexes et de sujets aussi alambiqués qu’ésotériques

La Science de l’Esprit

La Science de l’Esprit de Rudolf Steiner se définit elle-même comme une méthode rigoureuse permettant à tout homme, qui pratiquerait assidûment les exercices proposés entre autres dans le livre l’Initiation, d’accéder à une connaissance exacte des mondes supérieurs, si son karma lui en fait la grâce.[19] Une Science de l’Esprit qui n’a jamais eu qu’un seul chercheur Steiner lui-même.

Cette Science de l’esprit ne cherche pas à connaître le monde avec rigueur, précision et humilité, mais à l’intégrer dans ses catégories préétablies.

Voici un extrait du livre de Serge Prokofieff, fidèle perroquet de l’enseignement abscons de Steiner, très haut gradé dans la hiérarchie anthroposophe, intitulé : Rudolf Steiner et les mystères angulaires de notre temps :

« La cognition du rapport entre le microcosme et le Macrocosme correspond au cinquième rythme. Ce degré d’initiation devient à présent accessible au disciple grâce au sacrifice astral cosmique terrestre du Christ, et s’exprime dans la cognition du rapport cosmique de la Terre au Soleil, et également de sa métamorphose en tant que résultat du Mystère du Golgotha. Ce degré est désigné par les exercices amenés dans le rythme en question, et exprimant l’essence du chemin d’initiation que traverse le disciple en tant que microcosme, ainsi que la quatrième partie de la Méditation, où est relaté le chemin macrocosmique du Christ à partir du Soleil vers la Terre, en tant que modèle cosmique primordial de toute véritable initiation terrestre. [20] »

Sur les 574 pages de cet ouvrage, pratiquement chaque ligne est écrite dans ce style à la fois touffu et incompréhensible, mais qui sait se donner des allures pseudo-scientifiques. Dans cet ensemble saturé de références mystérieuses, on est comme noyé dans une architecture de rapports sémantiques que des phrases interminables parviennent à peine à supporter. Il devient ainsi impossible de comprendre quoique ce soit à un tel verbiage. Tout ce qu’on en retient, c’est que l’auteur a l’air de maîtriser parfaitement son sujet et connaître comme sa poche à la fois les processus initiatiques, la marche spirituelle passée et à venir de l’humanité, et ses rapports au Soleil et à la Terre. Ainsi, l’anthroposophe qui lit continuellement ce genre de littérature finit-il par avoir l’impression qu’il sait pertinemment ce qui relève de l’avenir proche ou lointain de l’humanité. Il finit par être comme écrasé par des monceaux de références dressant dans son esprit un édifice monumental où sa pensée se retrouvera prisonnière. En outre, c’est l’ossature même de la logique qui, par la méditation anthroposophique, sera en dernier ressort brisée. Nous pouvons le voir par exemple dans un petit texte de Rudolf Steiner extrait du Calendrier de l’âme, c’est-à-dire l’un des textes que les anthroposophes méditent régulièrement tout au long de l’année et récitent à chaque ouverture de certaines de leurs réunions :

« Ma pensée en sa force aujourd’hui s’affermit,

A la naissance de l’esprit associée ;

Elle éclaire des sens le sourd enchantement,

Lui conférant pleine clarté.

Si l’âme tout entière

Au devenir de l’univers cherche à s’unir,

La révélation de ce monde sensible

Doit en elle accueillir l’éclat de la pensée. »

(Rudolf Steiner, Le calendrier de l’âme, Ed. EAR., p. 99.)[21]

Anthroposophie et New-Age

L’Anthroposophie se présentant comme une Science de l’Esprit, ses adeptes s’offusqueraient d’être assimilés à la pensée du New Age. Il y a il est vrai, une différence de date entre l’une de l’autre : l’arrivée de la nouvelle conscience de l’homme et de l’ouverture de ses nouvelles potentialités est arrivée pour le New Age alors que l’anthroposophie ne voit cette perspective que pour 3573.

Les anthroposophes n’ont rien à reprocher aux mancies ; bien au contraire Steiner se présente lui-même comme un grand médium, un maître en astrologie, voire un exorciste. Ainsi médiumnité magnétisme, divination sont considérées comme des sciences spirituelles à part entière, à condition cependant que leurs praticiens soient validés par Steiner et ses successeurs. L’anthroposophie a des contours si flottants et ambigus sur le plan doctrinal, qu’elle peut phagocyter tous les types de pratiques et de croyances, même si elles sont contradictoires.

Les grands chantres du New Age font référence à la théosophie d’Héléna Blavatsky ou à Annie Besant dont s’est inspiré Steiner. Leur cousinage est évident.

Résumé conclusif

Steiner déclare que ses œuvres ne sont pas faites pour être lues, mais pour être méditées. Ses adeptes considèrent ces textes comme sacrés, textes qui seraient en eux-mêmes initiatiques. Mais la pensée de Steiner est nébuleuse, ses concepts flous, ses affirmations ne reposent sur aucun fondement vérifiable. Le jargon de Steiner, sublime pour ses disciples, demeure incompréhensible pour quelqu’un d’extérieur. Il faut subir une fascination quasi hypnotique pour adhérer à cette doctrine de ce maître l’enfumage.

 

Bertran Chaudet, diacre permanent,

fév. 2016 

Pour une analyse plus approfondie, nous recommandons particulièrement le Blog de Grégoire Perra[22] qui a passé son enfance son adolescence, puis est devenu enseignant et un membre important de la Société Anthroposophique, avant de prendre des distances et d’analyser le mouvement et ses ramifications. Il est actuellement philosophe.

Notes

[1] L’occultisme désigne l’ensemble des arts et sciences occultes (alchimie, astrologie, magie, divination, médecine occulte, kabbale) touchant aux secrets de la nature, à ce qui est non visible.

[2] La théosophie est un système philosophique ésotérique qui permettrait à l’homme de s’initier à la recherche du divin en lui et de la Vérité. Helena Blavatsky (1831-1891) avait des pouvoirs psychiques et médiumniques considérables qui subjuguaient son auditoire et ses disciples. À partir de traditions orientales et d’ésotérisme occidental, elle fonda la Société Théosophique en 1875. Elle voua une haine féroce à l’Église catholique. C’est ici, une des sources des courants du New Âge. Cette organisation spiritualiste s’apparente à d’autres mouvements initiatiques du même ordre (Franc-maçonnerie, Rose-Croix, Martinisme, Nouvelle Acropole).

Helena Blavatsky se retrouve dans les livres de Harry Potter sous le nom de Cassandra Vablatsky.

[3] Ce rite attire les hauts grades de la franc-maçonnerie et comporte 90 ou 92, voire 99 grades, et fait référence à la kabbale et aux mystères égyptiens.

[4] Paul Ariès, Anthroposophie, enquête sur un pouvoir occulte, le Cercle de Magie Sexuelle de Vienne.

[5] Rudolf Steiner, conférence du 13 février 1923 à Stuttgart, in Éveil au contact du Moi d’autrui, GA 257, Éditions Anthroposophiques romandes.

[6] Rudolf Steiner, Conférence faite à Berlin le 4 juillet 1916 in Êtres universels et Essence du Moi, GA 169, Éditions Anthroposophiques romandes

[7]Rudolf Steiner, Conseils, Ed. Fédération des écoles Steiner-Waldorf en France, page 132.

[8] blog de Grégoire Perra sur l’Anthroposophie, article communauté des chrétiens.

[9] Ib.

[10] Ib.

[11] Steiner R. Karma of the higher beings. In Manifestations of karma. Lecture 8, 25 Mai 1910.

[12] C’est au cours d’une initiation de type chamanique que le docteur Edouard Bach, ancien homéopathe, dit avoir reçu une révélation lui indiquant le nom de trente-huit plantes dotées de vertus thérapeutiques particulières, rééquilibrant l’esprit ou soulageant des perturbations psychiques ou physiques. C’est le transfert des forces spirituelles contenues dans les fleurs, récoltées à l’état sauvage, qui permettrait cette harmonisation. Aujourd’hui, de nombreuses fleurs sur le marché sont censées influer sur la conscience et permettraient d’ouvrir à la médiumnité. Certains proposent de charger positivement ces essences de plantes par la méditation et la transmission de pensée. Selon ses perspectives, la force de la pensée donnerait une énergie positive et réparatrice à « l’esprit » de la plante. Nous sommes en plein délire !

[13] Cosmos, Michel Onfray, Éditions Flammarion 2015.

[14] Marinelli R. and others. The heart is not a pump. Frontier Perspectives 5, 1995

[15] Steiner R., The Foundations of Human Experience (Foundations of Waldorf Education, 1). Great Barrington, MA: Anthroposophic Press, 1996, p. 60.

[16] Steiner R., Knowledge of the Higher Worlds and its Attainment. London and New York: Anthroposophic Press, 1944, , p. 28

[17] Rudolf Steiner, Le Premier Goetheanum et Le langage des formes du Goetheanum, Ed. EAR

[18] Blog de Grégoire Perra sur l’Anthroposophie Les différents cercles du milieu anthroposophique.

[19] Rudolf Steiner, L’Initiation, Ed. Triades Poche.

[20] Serge O. Prokofieff, Rudolf Steiner et les mystères angulaires de notre temps, Ed . Société Anthroposophique Branche Paul de Tarse, p. 354

[21] Extrait du Blog de Grégoire Perra sur l’Anthroposophie.

[22] https://gregoireperra.wordpress.com

2 réflexions sur « L’Anthroposophie et Rudolf Steiner »

  1. Oui c’est du délire.. .cependant pour vivre dans un petit village où une communauté d’anthroposophes s’est établie je suis effrayée de constater leur capacité d’infiltration et de séduction ainsi que leur but à peine voilé de « convertir » les gens à leur religion et de s’introduire par le biais de concerts, d’animation aux grandes fêtes religieuses dans les églises catholiques. Les petites chapelles oubliées de notre région sont « miraculeusement » repeintes et refleuries par les villageois convertis qui pensent avoir redécouvert la religion catholique. Devoir croire à la réincarnation ne les dérangent pas plus que ça. Il est indéniable que ces anthroposophes sont habités par une très forte spiritualité qui a malheureusement beaucoup à voir avec l’abbaye de thélème d’Aleister Crowley. Je suis heureuse et soulagée de trouver des sites comme celui-ci qui donnent de bonnes clés de lecture de ce mouvement. Il est apparemment pacifique et inoffensif mais en realité il est très dangereux et génère une forme de sectarisme.

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