Dis-moi qui je suis, ô ennéagramme…

par Mitchell Pacwa, S.J.


En Amérique et à l’étranger un système de classification des types de personnalité, l’ennéagramme, est devenu très populaire. À strictement parler, l’ennéagramme est un cercle avec neuf points dessus (ennea signifie « neuf » en grec, et gram signifie « dessin au trait « ). À l’intérieur du cercle deux chiffres relient les neuf points, un triangle et une figure étrange ayant une forme à six branches. La plupart des gens qui se réfèrent à l’ennéagramme, cependant, le relient à un système de typologie de la personnalité basé sur ce dessin. Dans des ateliers, ils apprennent que seuls existent neuf types de personnalité et que chaque personne s’inscrit dans l’un d’eux. Chacune de ces neuf types représente une tendance de la personnalité, une façon erronée ou même « démoniaque » de se comporter. Une fois qu’un individu identifie son type (généralement classifié par un numéro sur l’ennéagramme), alors il ou elle peut soi-disant apprendre à s’améliorer, ou au moins à éviter d’empirer, spirituellement.
L’ennéagramme est particulièrement populaire parmi les groupes catholiques, avec les paroisses et les maisons de retraite qui offrent des ateliers à travers le pays. Rares sont les enseignants ou les participants conscients de ses origines dans l’occultisme, une chose qui devrait être une source de préoccupation réelle pour l’Église chrétienne. On a entendu des échos sur une théologie fausse, gnostique dans l’enseignement de l’ennéagramme, bien que ses racines dans l’occultisme soient masquées. Le manque de recherche scientifique sur le système de l’ennéagramme est une cause supplémentaire d’inquiétude. Cet article va donc examiner ces trois aspects de l’ennéagramme : ses racines dans l’occultisme, sa théologie gnostique, et son manque de consistance scientifique.

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Ennéagramme. Réflexion des évêques américains

La fascination qu’exercent les outils de connaissance de la personnalité pour les personnes qui ne sont pas psychologues de formation, fussent-elles théologiens par ailleurs,  est un réel sujet d’étonnement. Cet attrait pour les nouveaux arbres de la connaissance du bien et du mal les amène à gober le premier fruit venu avec tous ses pépins. Il en est ainsi de l’ennéagramme.
L’ennéagramme connaissant un certain succès dans les milieux religieux car il introduisait la notion morale de péché, les évêques américains ont été les premiers à réagir vigoureusement face à cette dérive et à son caractère fondamentalement gnostique. Voici à ce propos ce qu’en disait le 31 janvier 2012 Anna ABBOTT dans le « Catholic World Report » sous le titre « Une dangereuse pratique »:

« En 2000 , la Conférence américaine des évêques catholiques a préparé un projet de déclaration ,  » bref rapport sur les origines de l’Ennéagramme ,  » mettant en garde contre son utilisation . Il n’a jamais été publié , mais il peut être trouvé sur le site du National Catholic Reporter . En 2003 , le document du Vatican «Jésus-Christ , porteur de l’eau de la vie» a examiné les dangers de la spiritualité Nouvel Âge , et a mentionné l’Ennéagramme dans son glossaire . En 2004 , le Comité sur la doctrine de USCCB [la conférence des évêques américains] a publié un « Rapport sur l’utilisation de l’ennéagramme : Peut-il servir comme un véritable instrument de croissance spirituelle chrétienne ?  » pour l’usage interne de la Conférence . Le Père Thomas Weinandy du Secrétariat pour la doctrine de l’USCCB nous a fourni ce rapport pour  cet article.

En février dernier , l’archevêque Thomas Wenski de Miami a expliqué la doctrine catholique sur l’Ennéagramme et les sujets connexes dans une colonne en ligne intitulé « New Age et vieux gnosticisme » . Il a écrit que l’Ennéagramme est un  » exercice de pseudo- psychologie prétendument fondé sur le mysticisme oriental , [ qui ] introduit une ambiguïté dans la doctrine et la vie de la foi chrétienne et par conséquent ne peut pas être utilisé de façon heureuse à bon escient pour promouvoir la croissance dans une authentique spiritualité chrétienne » . La contribution de l’archevêque est l’enseignement le plus clair disponible pour les laïcs sur ce sujet , et un net résumé des rapports des évêques .

L’Ennéagramme redéfinit le péché , entre autres concepts fondamentaux , en associant simplement les défauts avec des types de personnalité, ce qui est particulièrement tentant dans un climat culturel d’irresponsabilité et de narcissisme . Il encourage une auto- absorption malsaine sur sa propre  » type », de sorte que le type est en faute plutôt que la personne . Cela donne lieu à un état d’esprit déterministe à l’encontre de la liberté chrétienne. »

L’ennéagramme, outil de connaissance de soi ?

Cette réflexion sur l’ennéagramme  a été motivée  par le fait que les chrétiens en France sont de plus en plus sollicités pour participer à des sessions d’ennéagramme pour une meilleure connaissance de soi et  pour une meilleure évolution spirituelle. J’ai souhaité appuyer mon analyse sur deux ouvrages qui sont fréquemment cités comme preuve de fiabilité de la méthode  et comme document de travail lors des formations.

Il m’a paru en effet intéressant de plonger au cœur de ces deux ouvrages, dont la réputation des auteurs sert de caution morale à ceux qui enseignent et propagent l’ennéagramme dans les milieux chrétiens. Bon nombre de ceux qui se forment ou qui  accueillent ces formations dans leur  locaux ne les ont sans doute pas consultés, pour cette raison précisément.

Il s’agit de   « L’ennéagramme, un itinéraire de la vie intérieure » de  Maria Beesing, religieuse dominicaine, animatrice de retraites spirituelles, Robert Nogosek et Patrick O’Learry  jésuite (américain) qui intègre l’ennéagramme à sa pratique de la direction spirituelle, (Desclée de Brouwer, Lonrai août 2003).  Et de « Les neuf portes de l’âme : ennéagramme et péchés capitaux : Un chemin psycho spirituel. », de Pascal Ide. (Ed Sarment éditions du Jubilé. Octobre 2008)

Je soulignerai ici simplement quelques points  d’attention.

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L’homme et son corps dans la Liturgie

Le corps, les gestes et quatre des cinq sens sont pris en compte dans la liturgie catholique : ouïe, vue, odorat, toucher, et donnent toute la dimension du mystère de l’Incarnation.

« Ce que nous avons entendu, ce que nous avons contemplé de nos yeux, ce que nous avons vu et que nos mains ont touché, c’est le Verbe, la Parole de la vie. » (1 Jn 1, 1).

La liturgie, comme son étymologie leitos ou leitourgia l’indique, est une œuvre publique, un service de toute une communauté qui se tourne vers Dieu, et s’exprime par des paroles et des gestes. En latin le mot gestus désigne toute attitude tout geste, tout mouvement du corps et même toute mimique. C’est ainsi que la liturgie est le service de Dieu, par amour : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit. C’est là le grand commandement, le premier. » Et cet amour de Dieu, s’il est en vérité, entraîne au deuxième commandement qui lui est semblable : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». (Mt 22, 37-39).

La Consitution Gaudium et Spes, un des fruits du Concile Vatican II nous rappelle, s’inspirant de la riche Tradition de l’Église : « Corps et âme, mais vraiment un, l’homme est, dans sa condition corporelle même, un résumé de l’Univers des choses qui trouvent ainsi, en lui, leur sommet et peuvent librement louer leur créateur. » (GS 14, 1).

Cependant suite à la réforme de Vatican II, l’importance de la Parole de Dieu a été l’objet de toutes les attentions, oubliant parfois, l’importance des gestes et des sens, dans ce que nous enseignent la Bible et la Tradition. L’anthropologie qui intègre tout l’être personnel et l’être ensemble a été moins réfléchie tant sur le plan corporel que sur le plan de la mémoire globale. En cela, les liturgies orientales et la liturgie catholique traditionelle, dite de rite extraordinaire ont conservé les notions d’espace sacré, de geste, de couleurs, et d’encens propre à éveiller nos sens corporels et spirituels.

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Le charlatanisme à la culture ?

Mme Nyssen, Ministre de la Culture, a créé une école dirigée par un ancien responsable des écoles anthroposophiques Steiner-Waldorf ; cette école était couplée à un centre de recherches baptisé « Université du Domaine du Possible », ouvertement destiné à favoriser une « diffusion plus large » de la biodynamie, entre autres techniques « agro-écologiques ». Les « personnes sources » de ce centre comprennent des anthroposophes (et non des moindres), comme M. Jean-Michel FLORIN, depuis 1988 coordinateur du Mouvement de l’Agriculture Bio-Dynamique ; depuis 2010,  codirecteur de la Section d’Agriculture de l’Université libre de science spirituelle du Gœtheanum (Dornach- Suisse), qui est le centre mondial de la sphère anthroposophique. Il est en outre formateur, conférencier, écrivain et également co-rédacteur de la revue Biodynamis. Les enfants de l’école seraient associés à ce centre , devenu selon Mme Nyssen, « une opportunité de découverte pour les élèves ».

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