Vous avez dit : holistique ?

Un peu de vocabulaire

L’HOLISME (du grec holos, totalité) est une doctrine qui considère les phénomènes comme des totalités. Le mot qualifie la démarche par laquelle on regarde un phénomène, un objet, comme constituant un tout. L’holisme est donc une approche de l’être humain qui va trouver un point d’application essentiellement dans le domaine médical (où une spécialisation à outrance risque de faire oublier qu’un patient ne peut pas se découper en secteurs indépendants les uns des autres).

Cependant, le désir d’atteindre les réalités dans leur globalité, comme un tout, se retrouve aussi dans le domaine spirituel puisque l’homme est considéré comme ayant deux dimensions — spirituelle et psychique — l’âme, psuchè, étant justement ce que les psychiatres cherchent à guérir. Ainsi un individu holistique est considéré comme une globalité où tout fait corps, il est un tout qu’il ne faut pas compartimenter.

Comme il est mentionné sur un site internet, le holisme veut dire que l’homme est un tout : un corps (physique), une âme (mental, émotion), un esprit (cœur, souffle de vie). Le travail se fait sur la globalité de l’être

Mais la préoccupation holistique, qui a le mérite d’interroger sur l’urgence de prendre en compte l’unité de la personne, conduit paradoxalement à la confusion, car il n’y a plus de distinction entre l’ontologique, le théologal, le psychologique, le spirituel, etc. ; la distinction des ordres, au sens pascalien du terme, a disparu. L’holisme est un système de pensée — on pourrait dire : une idéologie — réducteur. Tout est confondu et inclus dans un ordre homogène et indifférencié.

Par ailleurs, on retrouve le mot holos dans CATHOLIQUE, Kat’holon voulant dire « selon le tout, la totalité ». Mais là, c’est le Mystère de la foi qui donne forme à l’Église et la structure, et qui par conséquent donne sa forme propre à la lecture de l’Écriture et à la vie chrétienne ; et donc aussi à la morale et à la mystique, à la spiritualité comme on dit couramment. « Catholique » implique la référence à une source qui nous précède. Ce principe qui rassemble organiquement le tout de la Révélation est méconnu par l’holisme, qui regarde les phénomènes comme un grand tout indifférencié.

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Chez mon dentiste holisitique

Auteur: Didier Pachoud, président du Groupe d'Etude des Mouvements de Pensée en vue de la Protection de l'individu {GEMPPI} 
Cet article a été publié une première fois dans I'« European Scientist » le 7 août 2019 sous le titre « De l'ultra modernisme au post modernisme, l'empire de la subjectivité et des pseudo-sciences »: https://www.europeanscientist.com/fr/opinion/de­lultra-modernisme-au-post-modernisme-lempire-de-la-subjectivite-et-des-pseudo-sciences/ 

Ces 4 dernières décennies ont vu la mort progressive du paradigme scientifique, de l’espoir d’une société parfaite, heureuse, acquise grâce au travail et au génie humain. Malgré de multiples progrès dans tous les domaines, l’amélioration globale de ses conditions de vie, l’homme occidental, hyper individualiste et égocentré, refuse les faits et les statistiques et s’en remet à son ressenti, infaillible lui (1), aux rumeurs circulant massivement sur internet et abandonne la raison pour se réfugier dans la subjectivité au service de ses états d’âme plus que de la réalité.

Le Paradis espéré ou plutôt exigé n’est pas advenu et des nuages se présentent à l’horizon de son futur, il est passé de l’espoir à l’angoisse et au désenchantement, il est passé du new age au next age (2), ce dernier étant beaucoup plus individualiste et pessimiste. Le mal semble contagieux et internet en est un vecteur principal de propagation. Le résultat ne se fait pas attendre, les symptômes de ce mal qui ronge nos sociétés apparaissent:

Désaveu, doutes envers les élites laissant la place au complotisme {10), aux croyances anti scientifiques (Terre plate, créationnisme, médecines charlatanesques … ). Les institutions religieuses sont, elles aussi, remises en question, c’est l’individu qui devient la mesure de toutes choses et les nouvelles croyances portées par le new age (2) se prêtent bien à ce profil.

Tout est égal, tous les avis se valent, peu importe qui parle et d’où il parle, l’ignorant peut pontifier sans complexe suri nternet et son avis sera pris avec autant de sérieux que celui d’un chercheur de haut niveau, puisque c’est l’Être ou le Moi cosmique qui exprime le réel et non la raison. Les algorithmes de l’internet se chargeront de l’entretenir dans cette bulle idéologique qu’il s’est forgée. Malheur à qui oserait évoquer l’idée que tout le monde peut se tromper et qu’il est prudent de diversifier les sources et les genres d’informations, ce serait ressenti comme une entrave à l’évolution de l’Être absolu infaillible qui est en nous.

C’est ainsi que de manière récurrente, beaucoup de ceux qui s’adressent au GEMPPI nous rapportent qu’en ayant osé émettre de tels doutes à un proche, ils se sont vu taxer de « parents toxiques» et mis à l’écart.

Pire, pour revenir aux élites, le chercheur sera soupçonné à priori de tromper le monde pour complaire aux maitres du «Système». Un vocabulaire qui ressemble étrangement à celui des témoins de Jéhovah, lesquels désignent « ce monde satanique » comme le « présent système de choses ».

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Les « bons fruits », critère ultime de discernement ?

En brève introduction, nous pouvons rappeler que plusieurs Communautés nouvelles ayant vécu un développement pléthorique ont eu des fondateurs déviants; et que de nombreuses grâces ont été reçues dans des lieux d’apparitions mariales problématiques ou récusées par les évêques… Comment faut-il comprendre ce phénomène apparemment contradictoire, et comment l’interpréter ? Un argument fréquemment invoqué est celui des « bons fruits »…

On affirme ainsi que, même si le fondateur est corrompu, la communauté est bonne, puisque le nombre important de membres et les œuvres florissantes l’attestent. Ou bien encore que la Vierge Marie est vraiment apparue, ou que le message transmis vient vraiment du ciel, puisqu’il y a de nombreuses conversions, guérisons, vocations, à la suite de pèlerinages dans ce lieu.

Mais est-ce suffisant pour résoudre le problème posé par une origine problématique parce que corrompue ? Dans un premier temps, nous allons examiner de plus près quelques paroles de Jésus sur les « fruits ».

1. Le fruit du disciple

La première affirmation de Jésus à prendre en compte se trouve dans l’allégorie de la vigne en Jean 15, 4-5.8 : « Demeurez en moi, comme moi en vous. De même que le sarment ne peut de lui-même porter du fruit s’il ne demeure pas sur la vigne, ainsi vous non plus, si vous ne demeurez pas en moi. Je suis la vigne ; vous, les sarments. Celui qui demeure en moi, et moi en lui, celui-là porte beaucoup de fruit ; car hors de moi vous ne pouvez rien faire. C’est la gloire de mon Père que vous portiez beaucoup de fruit et deveniez mes disciples. »

C’est donc lui, Jésus, qui nous fait porter le fruit véritable. Ce fruit est celui du disciple. Jésus nous demande simplement de « demeurer en lui ». Cette affirmation toute simple a des conséquences tout aussi simples pour notre vie en Église. En effet, subrepticement, la place première et centrale de la personne de Jésus peut être « squattée » de multiples façons, et différentes réalités peuvent s’immiscer entre Jésus et nous-mêmes, jusqu’à produire dans certains cas un écran opaque qui va créer une dérive.

En voici quelques exemples.
Une autre personne : un fondateur, une voyante, des messagers qui prétendent recevoir des locutions ou paroles du ciel, des prédicateurs à la mode (en retraites ou en rassemblements)…
> Une doctrine : l’enseignement d’un fondateur, les messages de voyants
Un moyen aboutissant à un système : une inspiration communautaire, une intuition de développement personnel, une pédagogie d’évangélisation
Un lieu-phare : lieux de possibles apparitions mariales, de retraites spirituelles prisées
Un courant spirituel marqué par des phénomènes extraordinaires …

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