Les 15 oraisons de sainte Brigitte

Dominique Auzenet

Sainte Brigitte (+ 1373) que l’on fête le 23 juillet, a été proclamée co-patronne de l’Europe. C’est une belle figure de sainteté. Si vous ne la connaissez pas, lisez sa notice sur le site nominis.

« On distingue deux périodes dans sa vie. D’abord une femme mariée et la mère de huit enfants, qui s’initia à l’étude de l’Ecriture et l’adopta comme règle de vie avec son époux comme tertiaires franciscains. Elle fut d’une charité généreuse et fonda un hôpital…

La seconde vie de Brigitte commença après son veuvage et son refus de se remarier afin d’approfondir « son union avec le Seigneur dans la prière, la pénitence et la charité… Après avoir distribué ses biens aux pauvres, elle se retira au monastère cistercien d’Alvastra, sans devenir moniale »…

Ses méditations sur la passion du Christ sont restées célèbres

« Comme il y avait longtemps qu’elle désirait savoir le nombre de coups que Notre Seigneur reçut en sa Passion, un jour Il lui apparut et lui dit : « J’ai reçu en mon Corps 5480 coups. Si vous voulez les honorer par quelque vénération, vous direz 15 Notre Père, 15 Je Vous Salue Marie et les 15 oraisons, que je vais vous enseigner, pendant un an entier… L’année étant écoulée, vous aurez salué chacune de mes plaies ».

Comment entendre ces paroles ? J’ai rencontré plusieurs fois au cours de ma vie sacerdotale des personnes à qui l’on avait proposé, ou indiqué, ou demandé, de faire chaque jour ces prières… Si peu que ces personnes soient psychiquement fragiles, cela provoque des troubles dans leur vie chrétienne, souvent sous forme d’angoisses.

Je me souviens de cette mère de famille nombreuse qui se croyait obligée de lire chaque jour les textes des méditations et de réciter toutes les prières… et qui finalement n’en trouvait pas le temps. Je lui ai conseillé d’arrêter et de s’occuper d’abord de ses enfants…

Autre exemple. Une personne m’écrivait récemment :

Je visite chaque semaine depuis novembre dernier une personne de 81 ans, qui est revenue à la foi et prie beaucoup depuis la perte de son mari. Elle lit chaque jour un petit livret qui ne contient que des prières, et elle est devenue accro à ce contenu. Au point qu’elle ne sort pas de chez elle sans emporter le livret avec elle… c’est ce détail qui m’a alerté.

Et elle m’a répété à plusieurs reprises ces derniers mois, que le livret lui dit que si elle prie cela 365 jours, sa place au ciel sera garantie, et il y a un passage où si elle fait assidûment ce qui lui est demandé, le Christ lui apparaitra et lui fera connaître la date et l’heure de sa mort…

Certes, comme elle a 81 ans, je suis conscient que parfois elle n’a pas toute sa tête, mais j’ai pris conscience lors de ma visite d’hier matin que quelque chose n’allait pas, et qu’elle est devenue comme dépendante et très accrochée au livret comme à un objet magique, et que sa plus grande peur quotidienne, c’est d’oublier de le lire ! (Du coup elle le fait plusieurs fois).

La responsabilité des maisons d’édition

Un autre problème réside dans le fait que certaines maisons d’édition, que j’appellerai « apparitionnistes », publient des livrets de prière assaisonnés de promesses prises au premier degré.

Resituer dans le contexte de l’époque

Bref, vous l’aurez compris, ce n’est pas sainte Brigitte qui est en cause ici, mais l’utilisation de ses méditations et prières, dans une situation hors contexte, assaisonnée d’une bonne dose de pensée magique…

Il n’est pas possible de considérer la parole énoncée plus haut comme une parole de Jésus pour aujourd’hui. Elle manifeste UNE CONCEPTION CORSETÉE ET COMPTABLE DE LA MISÉRICORDE.

C’était sans doute la façon de la transmettre à l’époque de sainte Brigitte; mais elle reflète une déviance qu’on retrouve à la même époque dans le commerce des indulgences, qui fut plus tard le déclencheur de la Réforme protestante.

Cette conception de la miséricorde divine est non-évangélique, elle ne correspond en rien aux parole et aux actes de Jésus.

Si l’on voulait traduire pour aujourd’hui la réponse de Jésus, on pourrait la saisir comme un encouragement à méditer régulièrement sa Passion (par exemple en lisant le récit de Marc, ou les prières de ste Brigitte), tout en la référant à l’abandon de Jésus à la volonté du Père (Notre Père) et à la présence de Marie le long de la Croix, unie à l’acte rédempteur de son Fils (Je vous salue Marie).


La vérité rend libre. La liberté est source de joie.

Comme en atteste cette photo d’une soeur brigittine (à Jérusalem).

Laisser un commentaire