Aventures et mésaventures du bien-être

Diffusé le 01/11/2023 à 22h48 Disponible jusqu’au 09/05/2024

Dans une société standardisée, parfois hostile et souvent indifférente, il est des souffrances impossibles à apaiser, qui font prospérer des solutions de bien-être qui proposent du sens autant que des remèdes.

Ce monde du bien-être est le creuset de nouvelles croyances, qui défient la raison et la science, et ouvrent la porte aux charlatans et aux manipulateurs.

Gérard Miller s’intéresse à toutes ces pratiques avec la curiosité attentive de Spinoza, qui disait :  » Ne pas se moquer, ne pas déplorer, ne pas détester, mais comprendre.  » Une plongée dans un univers alternatif qui révèle tout le désarroi et la violence sourde des sociétés contemporaines.

Réalisé par : Gérard Miller, Anaïs Feuillette

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L’état de sidération et de dissociation

Sidération et dissociation pendant un viol : les 2 mécanismes de survie du cerveau contre l’arrêt cardiaque

Sur le site Madmoizelle.com

Lors d’une expérience traumatique intense, le cerveau mobilise deux mécanismes d’urgence : la dissociation et la sidération. C’est ce qui explique l’absence de réaction de nombreuses victimes de viol : un réflexe biologique de survie.

Plus d’un quart des Français·es estiment que « lorsqu’une femme ne réagit pas et ne s’oppose pas, on ne peut en aucun cas parler de violences sexuelles ».

Dans une société qui baigne dans la culture du viol, ces chiffres issus d’une enquête IPSOS réalisée pour l’association Mémoire traumatique ne sont pas vraiment étonnants.

Ne pas réagir, ne pas être en état de se défendre ou d’appeler à l’aide est fréquent chez les victimes d’agressions sexuelles et de viol, mais l’explication scientifique de ce mécanisme de protection n’est que rarement délivrée.

Pourquoi les victimes de viol ne se défendent pas ?

La youtubeuse de la chaîne Le labo de la légiste a ressorti ce week-end une vidéo datant de 2013. On y explique très bien quels étaient les mécanismes psychologiques et physiologiques à l’œuvre, pour comprendre cette absence de réaction chez de nombreuses victimes.

Michel Cymès et Marina Carrère y détaillent ce que sont les états de sidération, de dissociation, et le syndrome de stress post-traumatique.

https://twitter.com/LaboDeLaLegiste/status/964556304034484227

Impossible de réagir pendant une agression sexuelle ?

Tout démarre avec une partie de notre cerveau nommée l’amygdale : son rôle est de décoder les émotions, de gérer nos réflexes. En cas d’agression, c’est l’amygdale qui déclenche une série de réactions :

  • Production d’hormones du stress : adrénaline et cortisol
  • Celles-ci accélèrent le flux sanguin, le rythme cardiaque, la respiration
  • Les muscles sont contractés pour être prêts à la fuite

Mais ces réactions initiées pour la survie peuvent entraîner une « surchauffe ». Marina Carrère détaille les réactions en chaîne :

« Les centres nerveux au niveau du cortex censés analyser et modérer les réactions sont comme dépassés par les signaux d’alerte. »

La victime est incapable de réagir car l’élément de son cerveau censé gérer ses réactions de survie est entrain de s’enrayer. Elle est comme paralysée : c’est l’état de sidération.

En parallèle, le niveau de stress continue d’augmenter puisque l’amygdale fonctionne à plein régime, trop fort en réalité.

« Pour éviter que le survoltage provoque un arrêt cardiaque, le cerveau déclenche une sorte de court-circuit avec de la morphine et de la kétamine.

L’amygdale est isolée, la production d’hormones de stress est stoppée. »

« Hors de son corps » pendant une agression

Mais le corollaire de ce « court-circuit », salvateur sur le moment, est le fait que la victime de l’agression soit totalement coupée de ses émotions, comme spectatrice des événements.

C’est ce que décrivent de nombreuses victimes de viol, qui expliquent avoir eu l’impression de voir la scène « d’en haut », d’être « hors de leurs corps » : c’est l’état de dissociation.

Suite à cette mise en quarantaine de l’amygdale, le souvenir n’est pas évacué vers l’hippocampe, censé être le siège de la mémoire. Il est piégé dans une région du cerveau qui n’y est pas dédiée et va donc se constituer en « mémoire traumatique ».

La victime peut développer ce que l’on appelle un syndrome de stress post-traumatique.

Laure Salmona, citée dans un article sur les agressions sexuelles entre enfants il y a quelques mois, expliquait ce qui en découle :

« Comme cette mémoire n’a pas été intégrée et traitée, elle peut provoquer une amnésie de l’événement, et peut ressurgir n’importe quand. »

Si ce souvenir n’est pas assimilé via une thérapie par exemple, Laure Salmona détaillait que « des flashs peuvent surgir n’importe quand, en particulier lorsqu’on se retrouve dans un endroit qui rappelle l’événement traumatique, lorsqu’on voit l’agresseur, lorsqu’on sent une odeur, lorsqu’on se retrouve dans une situation similaire ».

« C’est comme si on revivait la scène, ça peut aller jusqu’à l’hallucination visuelle, auditive, ça peut être extrêmement douloureux. »

L’avantage de cette vidéo est qu’elle explique de manière très pédagogique les mécanismes physiologiques, des réactions naturelles, que les victimes ne sont pas en mesure de maîtriser.

De quoi expliquer que oui, une victime qui ne réagit pas reste une victime et n’est en rien responsable de son agression

"Je m’en voulais de ne pas avoir pu réagir…. Je suis restée dans cet état plusieurs jours, à ne même pas pouvoir en parler. Maintenant je comprends mieux ce qui s’est passé. Le cerveau disjoncte par protection… C’est un mécanisme neurologique de préservation de la vie…. En conditions extrêmes…. "

À propos des prières pour la guérison

La récente enquête de Golias et le visionnage des vidéos sur les pratiques de guérison menées par certains frères franciscains conventuels en France et en Belgique soulèvent des questions fondamentales. Il y a là une tendance troublante à mêler notions de maladie et de péché, et à y associer, parfois de manière erronée, les fautes des générations passées, qui ne doivent pas être confondues avec le péché originel tel qu’il doit être compris.

D’un point de vue psychologique, l’approche psychospirituelle qui assimile (même implicitement) maladie et péché peut conduire à des graves dérives, comme l’ont montré les pratiques des agapètherapies. Ces dernières, par leur approche réductrice et dangereuse, n’ont fait qu’aggraver le mal-être des personnes en quête de guérison, associant de la culpabilité à leur maladie, les conduisant à des faux souvenirs induits, et amenant à une plus grande souffrance au lieu de la libération promise.

Voir les articles concernant le psychospirituel sur le site

Sur le plan théologique, cette confusion est également préoccupante. Jésus, dans les Évangiles, a clairement marqué une rupture avec l’idée que la maladie serait une conséquence du péché (Jean 9, 3). Les guérisons opérées par le Christ ne sont pas tant une recette quasi magique contre toute affliction corporelle, mais plutôt des signes de sa messianité. Il n’a pas guéri tous ceux qu’il a rencontrés, car quelques guérisons suffisent pour témoigner de qui Il est.

Cela transparaît clairement dans Matthieu 9, 6, où Jésus précise clairement que sa guérison n’est faite qu’« afin que vous sachiez que le Fils de l’homme a sur la terre le pouvoir de pardonner les péchés ». Ce n’est pas la guérison en elle-même qui est cherchée, et ce n’est évidemment pas pour dire que la maladie existe à cause d’un péché, mais simplement pour montrer que par son incarnation la libération du péché est possible.

Voir le livret Jésus face aux demandes de guérison

En ce sens, l’histoire de l’Église, insistant progressivement sur le salut des âmes plutôt que sur la guérison des corps, témoigne de la volonté de souligner que les guérisons sont des signes (et pas quelque chose qui s’apparenterait à de la magie). Une forme d’illustration : est la constatation que l’onction des malades soit devenue un sacrement, au sens étymologique un « signe »…

C’est un rappel important pour ceux qui, dans certains rituels improvisés, invoquent les passages de guérisons de l’Évangile. Comme le souligne « Dei Verbum » (texte essentiel, et dogmatique, de Vatican II), il est essentiel de prêter une grande attention au contenu et à l’unité de toute l’Écriture, et au respect de la Tradition vivante de toute l’Église. Dans des exhortations, il n’est pas acceptable d’invoquer un passage évangélique, mal compris et isolé, comme certains le font, et ainsi détruire deux millénaires d’avancement dans la compréhension de la Révélation.

Voir l’article de Sr Anne Lécu : les prières pour obtenir la guérison

Enfin, tout cela amène au risque de transposer ce pouvoir thaumaturge de Dieu à soi-même. Tel qu’il est cité dans cet excellent article au sujet des prières de guérison, Dom Dysmas de Lassus, prieur général de la Grande Chartreuse, rapporte l’anecdote suivante. Un membre d’une communauté du Renouveau Charismatique raconte au sujet des expressions « L’Esprit saint me dit que » ou « te dit que » : « Un jour, l’un de mes frères m’a dit : « Dis ‘je’au lieu de ‘l’Esprit saint’», et j’ai subitement compris combien une volonté de puissance personnelle pouvait se cacher sous de telles apostrophes, quelque peu terrorisantes pour des esprits encore peu formés. ».

Cette histoire illustre bien les risques d’une interprétation personnelle et subjectivisée de la foi, qui peut conduire à des abus de pouvoir et à des manipulations spirituelles.

Qu’est-ce que Nexus ?

Travail de l’équipe du site sosdiscernement

AVERTISSEMENT. Cet article emploie des concepts complexes. Il exige une lecture attentive. Les notes sont à lire : elles donnent les sources des affirmations proposées ou étudiées.

Le coaching en chemin de transformation

Les organisations et structures catholiques sont confrontées à un défi humain : finances en berne, personnel vieillissant, manque d’attractivité, scandales divers à assumer. Et pourtant le défi spirituel est toujours le même : annoncer envers et contre tous l’actualité du Salut offert par le Christ mort sur la Croix et ressuscité.

Pour tenter de résoudre cette tension entre « contrainte budgétaire et élan missionnaire »1, les structures et organisations catholiques sont parties du principe qu’« écouter ceux qui ont les mêmes opinions que nous ne porte aucun fruit… Accepter que ceux-là peuvent nous conduire à changer notre façon de penser »2 et ont ouvert leurs portes à des cabinets de consultants privés en tant qu’accompagnateurs ou facilitateurs. Si le coaching en développement personnel semble intervenir au niveau local dans les diocèses et les congrégations, via Talenthéo et quelques autres, le coaching en « chemin de transformation » se réserve l’intervention structurelle des grands organismes, ONG, associations nationales, conférences d’évêques, congrégations.

Ici c’est le cabinet de consultants Nexus qui a dernièrement reçu la vive reconnaissance des Évêques de France. Mgr Éric de Moulin Beaufort, prononçait en effet le vendredi 31 mars 2023 à l’issue de la réunion des Évêques à Lourdes ces mots : « La sérénité imprégnait encore nos discussions de jeudi après-midi, dans la même basilique Sainte-Bernadette, à propos de la transformation des structures de notre Conférence. Cette séance de travail faisait aboutir un chemin d’un an et demi, vécu sous la conduite patiente et attentive des consultants de Nexus. Je dois saluer ici Matthieu Daum, Étienne Gueydon, Stéphanie Léonard et Éric Langevin sans oublier Nancy Bragard dont l’accent américain est un des bons souvenirs de nos rencontres de septembre et octobre 2021. » 3

Nexus apparaissait déjà en 2021 : « La voix de l’Église en recherche s’est fait entendre sous la délicate conduite de Matthieu Daum, Nancy Bragard et Étienne Gueydon, nos facilitateurs de Nexus, et elle était, cette voix, douce et forte à la fois. »4

Qui est derrière Nexus ?

Matthieu Daum, fondateur de Nexus, se raconte sur le site du Mouvement des Cadres chrétiens 5: « Après avoir vécu dans un kibboutz, il rejette l’Église dans laquelle il a été élevé parce qu’il n’accepte pas « l’hypocrisie de certains de ses membres » ; il se forme en dynamique de groupe. En 2008, il découvre le monde des congrégations, en répondant à une demande pour la préparation d’un Chapitre en France. Le bouche-à-oreille le met en contact avec d’autres, soumis au défi de la déchristianisation et qui lui font la même demande. Les méthodes évoluent quand il s’approprie le « processus U (ou Théorie U)» (à cause de la forme en U du process), inventé par le consultant américain Otto Scharmer : le consultant n’impose rien, il chemine avec les groupes dans leur élaboration de leur solution. Pour lui, les consultations sont « régénératives » et font cheminer si elles sont bien construites, à l’écoute de ce que l’autre peut apporter de différent. En sort un livre : « Un consultant chez les religieuses »6

Continuer la lecture de « Qu’est-ce que Nexus ? »

Possible production de faux souvenirs par la méthode EMDR ?

Dominique Auzenet et l’équipe sosdiscernement

La méthode EMDR… recommandée à l’INIRR

Le 8 novembre 2021, à la suite du rapport de la CIASE sur les abus sexuels au sein de l’Église, la Conférence des Évêques de France après de nombreuses consultation de victimes, a créé une Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation (INIRR).

La mission de l’instance dont la présidence a été confiée à Marie Derain de Vaucresson, est nouvelle ; tout doit être inventé. Deux ans après, quel est le bilan de cette initiative sans équivalent ? Qui saisit l’instance et comment répond-elle ? Face à l’ampleur du mal fait aux victimes, face aux vies détruites et à ces drames que rien ne peut modifier, a-t-elle trouvé une voie crédible ? Sait-elle accueillir, écouter comme les victimes en ont besoin ? Peut-elle réparer l’irréparable, ou au moins apaiser, consoler un peu ?

En recueillant les paroles de victimes et de personnes engagées dans l’INIRR, ce film, profondément humain, délicat et impartial nous emmène au cœur de ce long processus. Une coproduction KTO/NOMADE production 2023, réalisé par Caroline Puig-Grenetier

L’équipe au travail sur le site sosdiscernement.org souhaite attirer l’attention sur un point.

Dans cette émission, calée sur la minute 34’13, il est dit que » la méthode vraiment phare scientifiquement serait l’EMDR » pour soigner le psycho-trauma.

Cela pose un vrai problème, car l’EMDR (comme la PNL) est une pratique dont il faut se méfier à cause des faux messages qu’elle peut induire.

Les thérapies de la mémoire retrouvée

Il s’agit d’une grande variété de techniques thérapeutiques qui se basent sur trois affirmations :

1- les symptômes actuels du patient sont causés par des expériences traumatisantes, telles que des abus sexuels, subies dans l’enfance 2- les souvenirs de ces événements ne sont pas conscients 3- rendre ce souvenir conscient (ou au moins reconnaître que le traumatisme s’est produit) est essentiel à la réussite du traitement.

Or, dans les remontées concernant les « thérapies de la mémoire retouvée » (TMR), des témoignages de plusieurs victimes, dont certaines font un procès à leur thérapeute, font état de faux souvenirs induits par EMDR.

Qu’est-de que l’EMDR ?

Si vous ignorez ce qu’est l’EMDR, traitement par désensibilisation des mouvements oculaires et retraitement, il y a déjà deux articles sur le site que vous pouvez consulter.

Formulaires de consentement éclairé à faire signer par le patient en thérapie EMDR

Il faut savoir que des documents ont été rédigés par les praticiens américains EMDR. Les procès et les dommages et intérêts versés aux patients mécontents les ont incités à devenir très prudents. On notera que la mise en garde concerne principalement les souvenirs « retrouvés » au cours de la thérapie EMDR.

Vous pouvez télécharger ces deux formulaires; d’origine américaine, textes anglais et français. Lien de téléchargement.

On peut y lire :

  • Des souvenirs pénibles, non résolus peuvent refaire surface par l’utilisation de la procédure EMDR. Certains clients ont eu des réactions pendant les séances de traitement que ni eux ni le clinicien responsable n’avaient prévu, y compris un fort niveau d’émotion ou de sensations physiques.
  • À la suite de séances de traitement, la survenue d’incidents / matériels peut continuer, et d’autres rêves, des souvenirs, des flashbacks, des sentiments, etc… peuvent refaire surface.

ou encore :

  • La psychothérapie et l’EMDR ne peuvent absolument pas faire la différence entre des souvenirs qui sont exacts, déformés ou faux basés sur les seuls récits, et en l’absence de données qui corroborent ces affirmations.
  • Les personnes avec des conditions limitatives ou conditions médicales spéciales (grossesse, troubles oculaires, etc.) doivent consulter leur médecin avant de participer à cette méthode thérapeutique. Pour certaines personnes cette méthode peut induire, à la suite du traitement, des souvenirs plus aigus, pour d’autres plus confus. Si vous êtes impliqués dans un procès ou devez témoigner, veuillez en parler avec votre thérapeute.
  • J’ai également été spécialement informé de ce qui suit : (a) Des souvenirs non résolus pénibles pourraient faire surface par l’utilisation de la procédure EMDR. (b) Certains clients ont eu des réactions au cours des séances de traitement que ni eux ni le clinicien traitant n’ont anticipés, y compris un haut niveau de l’émotion ou des sensations physiques. (c) Après la séance de cure, le traitement des incidents ou des matériaux peut se poursuivre et d’autres rêves, souvenirs, réminiscences, sentiments, etc. peuvent refaire surface. Si cela se produit, écrivez-les dans votre journal et amenez-les à la prochaine séance. En outre, vous pouvez m’appeler n’importe quand.Avant de commencer le traitement EMDR, j’ai soigneusement examiné toutes les données ci-dessus. J’ai obtenu tout apport supplémentaire et / ou conseil professionnel que je juge nécessaire ou approprié pour suivre ce traitement.

UNE GRANDE PRUDENCE S’IMPOSE DONC…