Que sait-on de l’Access Bars ?

Dans la revue de l’Unadfi, Bulles n° 156, déc. 2022.

ORIGINE

L’Access Bars ou l’Access Conscious­ness Bars est un soin énergétique in­venté en 1995 par Gary Douglas, qui a été un temps proche de la Scientolo­gie, et Dani Heer, un ancien chiroprac­teur devenu coach mental. Les secrets de cette pratique auraient été trans­mis à Gary Douglas depuis une autre réalité: il aurait posé des questions à l’Univers, et attendu, l’esprit ouvert, des réponses. En retour il aurait reçu des capacités de médium et de canal’, des dons qui lui auraient permis d’éla­borer cette pratique.

Cette pratique est aujourd’hui pré­sente dans 170 pays. L’Access Bars est apparue en France en 2010 et ren­contre un certain succès depuis 2015.

THÉORIE ET PRATIQUES

Il s’agit d’un répertoire de 32 points situés sur le crâne, dont la stimula­tion par application des doigts active des connexions électromagnétiques appelées « bars ». Chaque « bars » correspond à un aspect de la vie : vieillissement, santé, argent, sexua­lité, conscience, etc … et toutes nos « pensées, idées, croyances, considé­rations, émotions et attitudes » y sont contenues et stockées, à la façon d’un disque dur. Activer les « bars» revient à nettoyer ce disque dur, supprimer les fichiers qui empêchent « d’être conscient», de « recevoir »2.

En arrière-fond de cette pratique on trouve des principes issus de la Dianétique, une théorie de dévelop­pement personnel créée par Ron Hub­bard, le fondateur de la Scientologie. Certains principes de la dianétique sont analogues à ceux de l’Access Bars : promesses d’acquérir des pou­voirs comme celui de remonter dans le temps ou de lire dans les pensées, possibilité d’atteindre le statut d’« hu­manoïde» (qui correspondrait au sta­tut de« thétan » dans la Scientologie), dénigrement des non-humanoïdes, invitation à se séparer de sa famille et des êtres humains normaux, ensei­gnement que la médecine scientifique n’a pas d’efficacité sur les problèmes de santé. Il existe également des points communs en termes de fonc­tionnement : nature de l’engagement exigé des étudiants, coût élevé des cours et des séminaires, confidentiali­té du matériel de formation et droits d’auteurs sur ce matériel3.

Gary Douglas

L’histoire dit que lorsque Gary Dou­glas a reçu ses dons de médiums, il a aussitôt pris conscience qu’il devait « offrir des classes pour renforcer et faciliter plus de choix et de possibili­tés chez les autres »4• Il est ainsi« of­fert» à celui qui le souhaite la possibi­lité de devenir thérapeute Access Bars, à l’issue d’une journée de formation facturée 300€. Après trois jours sup­plémentaires de formation, le théra­peute devient facilitateur (c’est-à-dire formateur). Il peut continuer à se for­mer pour devenir facilitateur certi­fié. Il existe encore ensuite un grand nombre de niveaux de spécialisation.

Le premier outil présenté en forma­tion est une« formule de déblayage » à répéter dans sa tête ou à voix haute comme une incantation, afin de « faire apparaître les énergies et les déblayer ». La formule en question : « Right and wrong, good and bad, poc and pod, all nine, shorts, boys and beyond ». Elle n’a aucun sens, mais elle n’est pas faite pour être comprise : « heureusement, tu n’as pas à la com­prendre pour que cela fonctionne. C’est conçu pour contourner ton esprit logique. Si ton esprit logique pouvait résoudre des choses qui ne fonction­naient pas dans ta vie, ne serait-ce pas déjà réglé ?5 » La répétition de cette formule est un prérequis à l’activation des « bars».

Au fur et à mesure des formations et de la progression des niveaux, les discours évoluent, la dimension éso­térique se faisant de plus en plus étrange, énigmatique mais également, à bien des égards, nocive. Lors de la formation pour devenir facilitateur, on enseigne au stagiaire qu’il sera ca­pable d’effacer le passé et la mémoire de son client. Le concept d’« huma­noïde » commence à être développé.

Il s’agirait d’une catégorie à laquelle appartiennent les praticiens d’Access Bars : « connais-tu la différence entre les humains et les humanoïdes ? Les humains passent leurs temps à juger tout le monde et leur dire combien ils ont tort. Les humanoïdes passent leur temps à se juger et à se demander ce qui ne va pas chez eux. Il n’y a rien qui cloche chez toi. Tu es un humanoïde. Si tu cherches toujours ce qui cloche en toi, tu es un humanoïde. Si tu sais toujours que tu as raison, tu es un hu­main ».

Les humanoïdes seraient par ailleurs capables de lire dans les pen­sées de tout un chacun « sur un rayon entre 12 et 12 000 m dans toutes les di­rections. »6 Puis est révélée l’existence de six entités capables de prendre possession des corps des personnes. Les cinq premières entités sont des sortes d’âmes en peine. La dernière entité correspond aux démons, qui sont dangereux mais qui peuvent être chassés grâce à un rituel d’exorcisme. La suite : des elfes, des serpents à sonnettes, des formules magiques permettant d’activer des capacités de « mimétisme biomimétique » …

MISE EN GARDE

Une grande partie des signale­ments et témoignages recueillis par les associations de défense des vic­times de dérives sectaires dépeignent des situations de perte financière après un investissement de milliers d’euros : flot incessant de formations, frais divers (matériel, ouvrages, ins­cription) cotisation annuelle, et solli­citations insistantes par courriels pour obtenir des dons pour la construction de propriétés à l’étranger utilisées comme centres de bien-être.

Une seule étude a démontré son im­pact sur la dépression et l’anxiété. Son auteur est diplômé en médecine na­turelle à l’université quantique d’Ho­nolulu et l’étude a été publiée dans Energy Psychology, une revue ésoté­rique 7. Évidemment, cette pratique de soin énergétique n’a jamais été validée scientifiquement. Quant à la formation, elle ne bénéficie d’aucune reconnaissance officielle.8 En 2020, dans le cadre d’un numéro d’Envoyé Spécial, une journaliste avait suivi une formation d’Access Bars. Au cours de son investigation elle avait découvert que l’Access Bars figurait au catalogue des formations proposées par Pôle emploi, aux côtés d’autres pratiques de soin non conventionnelles.9

L’Access Bars est une méthode présentant de nombreux risques. Elle s’appuie sur des concepts assez sé­duisants pour attirer toute personne en proie à des questions existentielles ou qui ressent un fort besoin d’appar­tenance. Parce qu’elle introduit l’idée d’une identité « humanoïde », sorte d’être humain amélioré, capable de percevoir des choses que les êtres hu­mains normaux ne perçoivent pas, et en faisant de l’accès à cette identité une initiation, la doctrine sous-ten­dant la pratique de l’Access Bars am­plifie les risques de rupture. La pru­dence est de mise d’autant plus que cette pratique prétend agir sur les souvenirs, manie le concept de capaci­tés extraordinaires, propose un rituel d’exorcisme … autant de procédés qui peuvent mener à l’emprise.

1. Un canal est une personne qui excerce le channeling, une pratique new age consistant à communiquer avec des « êtres supérieures ».

2. Victor Garcia,Access Bars Consciousness : les documents secrets, 22.03.2019

3. Access Consciousness, Psiram, 18.04.201

4. Op.cit, Victor Garcia,Access Bars Consciousness : les do­cuments secrets

5. Ibid. 6. Ibid.

7. Unadfi.org, Que sait-on de ? L’Access Bars Consciousness, 11.04.2019

8. Miviludes,Rapport d’activité & études 2018-2020,202 /, p. 68 9 • Unadfi.org, Reconversion pas très professionnelle, 12.04.2020

9. Unadfi.org. Reconversion pas très professionnelle. 12/04/2020.

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