Les mantras

Promenons-nous... non pas dans les bois, mais sur internet. Nous y trouvons une  foule de « mantras de guérison », « de purification », « de connexion »   et autre… Et une pratique énergétique avec un petit mantra à réciter,  « ça le fait tout de suite plus » … Dans la médecine  tibétaine les mantras sont considérés comme très puissants puisqu’ils  peuvent être utilisés comme « traitement » seuls ou en compléments de  médicaments aux plantes ou massages. Le médecin peut en effet demander à  son patient de réciter tel ou tel mantra. Généralement si ce dernier  est pratiquant bouddhiste, il lui demandera de recevoir l’initiation de  la divinité correspondante. Les médecins tibétains  ont donc parfaitement conscience de la « portée énergétique et  spirituelle » du mantra qui ne saurait se limiter à un « simple  ronron », un simple son répété sans but… 

Dans l’hindouisme et le bouddhisme principalement, un mantra (« formule mystique », « incantation magique », en sanskrit) est une formule condensée, formée d’une seule syllabe ou d’une série de syllabes, répétée sans cesse avec un certain rythme, dans le cadre d’un exercice de méditation. La récitation d’un mantra crée une vibration qui entre en résonance avec des sons sacrés.

En revanche, il ne faut pas confondre la récitation des mantras avec la prière du chapelet, par exemple. Dans le christianisme, toute prière est une relation à Dieu et la paix qui peut en découler est une grâce divine, non pas un état de béatitude attribué à un quelconque « pouvoir du son ».

De même, la prière du cœur dans l’Hésychasme des chrétiens orthodoxes s’accompagne d’une répétition constante du nom de Jésus (« Seigneur Jésus, prends pitié de moi ») qui trouve son origine dans les injonctions à la prière constante : « Quiconque invoquera le Nom du Seigneur sera sauvé » (Ac 2, 24); « Priez sans cesse, en coures choses, rendez grâce à Dieu » (1 Th 15, 17-18).

P. Jean-Christophe Thibaut, Un regard chrétien sur la sophrologie, Ed. Artège, 2021, note 22 p. 136.

Là où le mantra est carrément toxique

Une personne m'envoie son témoignage :

Dans ce que j’ai connu dans le bouddhisme tibétain, les mantras étaient reliés à l’invocation de divinités. Ils étaient récités dans le cadre de rituels complexes où le sons lors de la récitation du mantra n’était pas le seul élément. Il s’agissait aussi de visualiser la divinité correspondante devant soi ou au dessus de notre tête en récitant le mantra associé, d’une certaine façon (rythme chanté).

Généralement l’ensemble : visualisations, mantra répété à haute voix parfois pendant des heures (en fonction des rituels) et sons des instruments notamment du tambour, ainsi que les gestes rituels effectués avec mes mains (mudras), rendait l’état vécu plus proche de la transe chamanique que de la prière chrétienne. Tous les sens sont sollicités et saturés par les sons, les visualisations, la gestuelle, l’encens, les offrandes…

D’autant plus qu’au cours du rituel, il s’agissait « d’incorporer » en soi la divinité invoquée et ses qualités (rituels emprunt de chamanisme primitif). Ex: Tchenrézi divinité de la compassion, Bouddha de médecine dont on se remplissait du nectar sensé s’écouler de son coeur …

Élargissement de la conscience au « grand tout »
au fur et à mesure des répétitions du mantra aum (sanskrit)

Le mantra était donc associé à une visualisation d’une divinité à laquelle il correspond. Il est la manière de l’invoquer et de « la prier ». On s’adressait donc à une « altérité » mais avec laquelle il s’agissait à la fin de fusionner et non pas de se mettre en relation dans un dialogue intérieur. Elle entrait en nous, on se laissait « habiter » (pour ne pas dire posséder) par elle et on ne faisait plus qu’un. Grâce aux qualités de la dite divinité, ce moyen dit « habile » dans le jargon du bouddhisme tibétain, était sensé permettre un accès plus rapide à l’Éveil en révélant la nature de l’Esprit.

C’est ce type de rituels qui a permis que je développe les « siddhis » ou pouvoirs (médiumnité, pouvoirs de guérison…) dont la présence était pour le maître spirituel, la preuve de l’avancée vers le chemin de l’Éveil alors que ce n’était que le résultat de la « possession » de ma personne, liée à des « êtres » ténébreux. Car rien ne nous dit que ce qu’on invoque est bienveillant, ni que ce qui « entre en notre coeur » lors des rituels est une divinité « gentille »…

Les maladies dans la médecine tibétaine peuvent avoir une origine spirituelle, comme des « attaques démoniaques » et il va alors s’agir d’invoquer la protection d’une divinité. Dans le bouddhisme tibétain, les mantras véhiculent l’énergie de la divinité correspondante et permettent de l’invoquer. Ils ne sont donc pas anodins. Loin de là! Ils sont très puissants au contraire.