(3’38) – Phase de séduction avant l’âge de la relance dans un stade nouveau. Film « Prix du public » du « SECTIVAL », festival de courts métrages sur les dérives sectaires, concours national organisé par le GEMPPI (1) dans le cadre d’appel à projets de la Miviludes (2) et même pour les grands écrans le 2 mars 2024 à Marseille (3).
1) – GEMPPI – Groupe d’étude des mouvements de Pensée en vue de la protection de l’Individu – Association d’aide et de prévention des dérives sectaires : 2)-Miviludes – Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires : 3)-Le sectival, événement du 29 septembre 2023 : Pour toute information complémentaire, contactez : gemppi-wanadoo.fr
Adrien Bouhours, bibliothécaire, historien, spécialiste des courants ésotériques et auteur de « Le christianisme au défi des nouvelles spiritualités (Ed. Artège)
Comment expliquer la sécularisation si brutale du monde occidental et la perte de vitesse des Églises traditionnelles ? Que signifie ce passage d’une société organique et chrétienne à une société syncrétiste et individualiste où chacun modèle sa spiritualité au gré de ses désirs ? Le « nouvel âge » annoncé par les acteurs de ces mutations est-il à la hauteur des promesses de bonheur et d’accomplissement qu’ils véhiculent ?
En réponse au discours promotionnel de la « nouvelle spiritualité » qui présente son succès comme inscrit dans le sens de l’histoire, Adrien Bouhours livre une analyse tranchante de ses sources historiques et décrypte les causes de la séduction qu’elle exerce.
Il met en lumière ses racines ésotériques, issues des mutations religieuses de la Renaissance, et éclaire ses liens avec la promotion de spiritualités orientales idéalisées et avec l’essor de la culture du bien-être et du développement personnel.Pour dissiper les funestes mirages de la religion nouvelle, l’essayiste lance un appel réfléchi à redécouvrir les richesses oubliées du christianisme, seules à même de combler notre soif d’espérance, de transcendance et de vérité.
Recension par Guillaume Daudé
dans La Croix du 21 mars 2024
Des livres de Frédéric Lenoir au best-seller Trois amis en quête de sagesse paru en 2016, en passant par le Yoga d’Emmanuel
Carrère publié en 2020, quel est le point commun de cette littérature à
succès ? Tous ces livres relèvent d’un courant foisonnant et
protéiforme qu’on désigne souvent sous le nom de « nouvelles
spiritualités », et auquel l’historien Adrien Bouhours vient de
consacrer son dernier ouvrage.
Une
thèse forte le traverse : ce ne sont pas l’athéisme ou l’islam qui
supplantent aujourd’hui le christianisme mais ce courant, selon lui
largement sous-estimé par les catholiques. Pour l’auteur, le caractère
nébuleux des « nouvelles spiritualités » ne signifie pas qu’elles n’ont
pas d’unité : elles professent toutes la possibilité « d’accéder directement à une dimension divine sans passer par les médiations institutionnelles ».
Alors
qu’elles sont souvent vues comme la religion d’avenir, l’auteur
explique pourquoi elles séduisent tant : elles correspondent à l’âge de
la mondialisation, de l’écologie et de l’individualisme, en proposant
une synthèse planétaire des sagesses, une spiritualité holistique et une
réalisation de soi.
Pourtant,
ces « nouvelles spiritualités » ne sont pas aussi nouvelles qu’elles
le prétendent, analyse l’historien. Selon lui, elles trouvent leurs
racines dans les courants ésotériques nés à la Renaissance, qui se
développent avec la franc-maçonnerie à partir du XVIIIe siècle, puis avec les spiritualités orientales importées en France dès le milieu du XIXe siècle.
Dans
une dernière partie plus apologétique, l’auteur s’attache de manière
convaincante à dissiper les fausses promesses des « nouvelles
spiritualités ». En prétendant prendre le meilleur de toutes les
religions qui détiendraient chacune une parcelle de vérité, elles en
gomment les aspérités et ne font en réalité que les utiliser au service
de leur propre conception de la vérité, analyse-t-il. À titre
d’illustration, le roman autobiographique d’Emmanuel Carrère, Yoga,
écrit après une dépression, montre, selon l’auteur, toute l’ambiguïté
de la « nouvelle spiritualité » : il y voit un détournement de pratiques
spirituelles à des fins thérapeutiques qui n’est pas sans danger. Ce
livre exprime cependant une quête de sens, selon lui bien présente chez
nos contemporains, alors même que Dieu est devenu un gros mot. Le défi
pour les chrétiens : répondre à cette soif d’absolu.
Un article de Damien Karbovnik, sociologue et historien des religions
Fabriquer ses propres croyances pour se distinguer de celles de sa famille, ériger la phrase « prendre du temps pour soi » en nouveau mantra, remplacer la religion par du développement personnel : le monde spirituel est-il devenu un objet de consommation comme les autres ? Pour beaucoup d’individus devenus adultes au tournant de l’an 2000, les conséquences de l’individualisme et du néolibéralisme ont eu aussi un impact sur leur rapport à la spiritualité.
Avez-vous déjà essayé le puppy yoga ou le yoga wine,
déclinaisons les plus récentes et les plus branchées d’un yoga sans
cesse réinventé ? À moins que vous ne soyez davantage tenté par une
« retraite spirituelle laïque » ? Ou alors avez-vous ressenti en vous
l’appel de votre « sorcière intérieure » ? Mais peut-être êtes-vous
plutôt « appli de méditation » ?
La « révolution spirituelle », constatée dès les années 1990 par les sociologues Paul Heelas et Linda Woodhead, semble plus que jamais en marche et ne cesse de gagner en ampleur.
Dans les librairies, les rayons qui sont dédiés à la spiritualité ne font que croître et absorbent ceux dédiés à la religion, au bien-être, au développement personnel ou même à l’ésotérisme.
Associée à de multiples croyances et pratiques – du chamanisme à l’écologie en passant par la sorcellerie – la notion de « spiritualité » a le vent en poupe et de plus en plus de personnes se définissent grâce à elle, afin de mieux se distinguer de la religion. Que cherche-t-on à exprimer aujourd’hui par ce terme ? Pourquoi l’oppose-t-on à la religion ?
La difficulté à définir la spiritualité se dissipe en partie
lorsqu’on la met en rapport avec le contexte de notre modernité tardive,
période contemporaine déterminée par l’accélération technologique,
notamment, en suivant le philosophe Harmut Rosa. Plus souple que la religion, il convient de comprendre la « spiritualité moderne »
comme une multitude de systèmes individualisés, en permanente évolution
et animée par une quête de sens et d’épanouissement personnel.
En filigrane, dans ces nouvelles spiritualités, s’observent aussi les conséquences de l’individualisme et du néolibéralisme, autant dans le rapport qu’ont les individus avec que dans l’idéologie qui les anime.
Jessica Schab, alias Jessica Mystic a contribué à la diffusion de la spiritualité New Age à travers le monde. Aujourd’hui sceptique, elle alerte sur les dangers de croyances qui lui furent pourtant si chères.
Voici l’entrevue filmée d’Elisabeth Feytit avec elle, réalisée à la suite d’une semaine de tournage au Canada pour le film documentaire « Ex-gourou » sur son parcours personnel d’ancienne guide spirituelle.