En 2014, l’ONU vote en faveur de l’instauration d’une “journée internationale du yoga“ sous l’impulsion du Premier ministre nationaliste indien. En 2021, celui-ci vante les “vertus protectrices“ de la pratique contre le coronavirus, dans un pays ravagé par la pandémie.
Au-delà des manœuvres politiques et économiques, le yoga est le
théâtre de nombreux scandales. Entre pseudo-médecine et abus en tout
genre, des gourous à la renommée internationale jouent avec les
aspirations d’Occidentaux en quête de Vérité, de guérison physique ou d’équilibre psychique.
Que peut apporter la pratique du yoga ? Comment éviter les dérives et identifier les signaux d’alerte ? Quels sont les mécaniques d’entrée dans une secte, alors que l’on croit être en pleine possession de son libre-arbitre… ?
Témoignage d’une personne qui a souhaité partager son cheminement (4/4) pour aider d’autres personnes, tout en restant anonyme.
Lorsque j’étais dans la secte bouddhiste et initiée aux pratiques tantriques, on nous servait un discours « New âge » auquel nous adhérions sans trop nous poser de questions. Ce discours était plus acceptable pour nous les Occidentaux, et a été à la base de la manipulation dont j’ai été victime, puisqu’il permettait la dissimulation de la nature exacte des rituels.
La nature cachée des divinités invoquées
À savoir qu’il n’y avait pas dans cette voie du bouddhisme, de divinités au sens d’une altérité d’une nature surnaturelle et autre que celle de nous autres, les humains. Les « divinités » qu’on invoquait lors des rituels étaient présentées comme étant de simples « représentations », « des supports imagés » des qualités que nous devions développer en nous (sous-entendu sans nous lier à quoi que ce soit d’extérieur à nous-même).
L’aspect « rationnel » de cette présentation était mis en avant régulièrement : ces rituels permettaient de développer tous ces pouvoirs et capacités cachées qui font que nous n’utilisons pas l’intégralité des potentialités de notre esprit… Rien d’ésotérique, de magique ou de cette nature-là. C’était « rationnel ».
Quand on ne nous servait pas que cela était un moyen d’atteindre l’Éveil et donc de « revenir à cet état plus pur » et plus « connecté » avec sa nature profonde et la nature en général que l’homme, perverti par le progrès, la culture occidentale et la technique aurait perdu. Involuer, se « recroqueviller », « se défaire de tous ces voiles » qui nous cachent cette mystérieuse « nature de l’esprit » dont on nous parlait sans cesse. La fameuse vacuité…
Une libération donc à la fois spirituelle mais aussi culturelle et quelque part presque une libération de cette nature impure d’être humain infecte que nous étions devenus…
Il s’agissait de retrouver « l’élite pure des origines » (je rappelle que j’étais dans une secte dont l’élitisme a fait partie de l’emprise) et cela justifiait le caractère secret des initiations ne devant se produire qu’entre maître et disciple, dûment éprouvées à travers une série de « mises » à l’épreuve, orchestrées par le maître seul.
Cet « enseignement secret » n’était pas présenté comme « accessible à tous » mais seulement au disciple (différent des autres) qui aurait été éprouvé suffisamment par son maître et « jugé digne » de le recevoir. Il y avait donc des « conditions » à cette libération, présentée comme étant possible en une seule vie (sortie du cycle des réincarnations) et bien plus rapide que les autres voies bouddhistes.
Quand j’ai soulevé tous ces points, le maître m’a ordonné de me taire, de ne rien dire d’autre que « la version » que je viens de développer, sous prétexte que les Occidentaux ne comprendraient pas de quoi il s’agit (trop coupés des origines, ils ne sont plus en mesure d’entendre la vérité, c’est pourquoi le Maître, seul être éclairé, les y conduira ; et d’aveugles ils deviendront voyants, d’aliénés, ils deviendront libres)…
Sous prétexte surtout de ne pas ralentir, voire de freiner le nombre d’adhésions des personnes à ce groupe, donc de faire chuter les revenus financiers du Lama (rien n’était gratuit) et sa volonté grandiose de prosélytisme en Occident (il aurait été envoyé en Occident par son propre maître pour y dispenser les enseignements et les libérer…)… Un grand délire mégalomaniaque auquel ne seront associés que les disciples les plus confiants dans le maître (et ceux qui donnent le plus d’argent…) et les plus aguerris qui après avoir enduré les épreuves seront initiés aux rituels les plus secrets (ceux sur lesquels il a le plus d’emprise)… Mais à l’époque, je ne comprenais pas encore tout cela…
Pour en revenir à l’altérité dans ces rituels, il y avait un grand mensonge vis-à-vis de la nature exacte de ces divinités. Pour moi, ces rituels, encore très imprégnés d’anciennes traditions chamaniques himalayennes et donc ayant une dimension ésotérique incontestable, nous mettaient en lien avec des « êtres extérieurs à nous-même » qu’il s’agissait d’invoquer longuement durant les rituels (mantras, invocations et visualisations), avant de les visualiser siégeant au-dessus de notre tête ou dans notre cœur, puis de les « incorporer » à savoir de les faire entrer en soi et de les laisser se dissoudre en soi (accès à la vacuité).
Il y avait donc bien une altérité au départ de ce rituel, au sens d’une mise en relation avec des êtres d’une autre nature que nous-même, dont le but caché était qu’ils nous « habitent ». Les « pouvoirs » qu’on développait ensuite (médiumnité, télépathie, pouvoir de guérison…) n’étaient pas dus comme on nous le disait « au développement de nos capacités jusque-là endormies en nous-même » mais bien à l’expression de la « prise de pouvoir de ces êtres » sur l’être profond de l’initié. Loin de mener à un chemin de libération, cela confine peu à peu à l’aliénation.
Leur impact sur l’identité de l’initié
Il est intéressant de noter que dans l’histoire de cette branche du bouddhisme, beaucoup de ces « divinités » sont décrites dans les textes comme étant des démons sanguinaires et guerriers que de grands maîtres auraient convertis au bouddhisme… De démons ils deviennent donc « angéliques et bons », capables de nous mener sur le chemin de l’Éveil… Ils sont présentés comme des alliés que « certains humains réalisés » (les grands maîtres en question) auraient donc « domptés » pour le bien de la lignée spirituelle et de l’ensemble des initiés qui recevront « leurs pouvoirs ». Le Mal devient le bien avec une facilité déconcertante par l’intermédiaire d’humains divinisés, devenus des Bouddhas…
Il est à noter également que ces « divinités » sont le plus souvent représentées en union sexuelle, censée représenter la fusion du masculin et du féminin. Pour ma part cela n’a pas été sans conséquences sur ma propre identité sexuelle. En effet en plus du fait d’avoir peu à peu totalement déséquilibré ma sexualité, cela a fini par atteindre mon identité sexuelle. J’en étais venue à douter de mon identité sexuelle féminine et à vouloir changer de sexe pour devenir un homme. Puis ne sachant plus très bien, je me sentais à la fois homme et femme, désirant posséder les deux sexes… Désirant également les hommes, autant que les femmes… Cette perturbation profonde de l’appréhension de mon identité sexuelle m’a plongée dans une détresse terrible, d’autant plus que je n’avais jamais eu ce genre de questionnement.//
Les psychologues que j’ai alors consultés n’ont trouvé aucune psychopathologie, mais également aucune explication à ces questionnements et déséquilibres soudains… Si je n’ai jamais « cédé » à ces tentations absolument terribles et débridées qui m’ordonnaient « de jouir autant des hommes que des femmes dans une absence de limite totale », cela m’a fait beaucoup de mal. Dans le groupe sectaire, les autres y voyaient juste « la libération de pulsions profondes », bridées jusqu’à présent par la morale, l’éducation ou encore la société… Ils y voyaient du positif et du « libérateur » là où je subissais et me sentais « dépossédée de moi-même »… Tout pris fin lors des prières de délivrance. Ce fut ensuite comme si tout cela n’avait jamais existé…
Il n’est pas anodin d’invoquer ces divinités et donc cette altérité, de la faire entrer en soi pour qu’elle s’y loge, pour qu’elle en fasse « sa maison ». On voit bien que ce sont des reliquats de chamanisme primitif. Maintenant que je comprends mon vécu, je me dis que j’ai accepté, par ignorance et manipulation mentale, d’être « parasitée », habitée par des esprits dont au final on ne sait rien, si ce n’est que ce sont des démons…
Si ce n’est aussi qu’ils sont comme des parasites et qu’ils distillent peu à peu leur poison de mort en nous. Ils fusionnent si bien (et si discrètement) avec notre être qu’il est difficile pendant longtemps de faire le rapprochement entre les transformations que l’on vit
dans son corps (perceptions sensorielles différentes : médiumnité),
dans son esprit (pensées parasites, mauvaises, dépravées qui semblent étrangères à soi et s’imposent)…
et les initiations.
J’ai l’impression que « pour opérer en toute discrétion », ils injectent leur venin qui paralyse l’esprit critique, le recul et la capacité à se déterminer soi-même. Leur piqûre gonfle tant l’ego devenu aveugle qu’elle est acceptée sans aucun problème. Elle fait presque du bien… Et elle injecte le mal…
Il va sans dire aussi que le développement des pouvoirs, flatte l’ego dans un premier temps. D’autant plus que le maître, fier de son disciple, l’encourage dans ce chemin en lui présentant cela comme les « preuves objectives » qu’il récolte, les fruits de la libération (je vous passe les récits qu’on a pu me raconter sur de grands maîtres ayant atteint l’Éveil et qui avaient développé de tels pouvoirs voir des pouvoirs encore plus puissants)…
Et l’initié, le disciple, le voilà qui « régresse et revient » à cet état où « toutes ses facultés » même les « plus intuitives » comme la médiumnité ou les capacités de guérison se manifestent. Le disciple, confiant pense être sur la bonne voie… En fait il est lié aux esprits et déjà bien pourri par l’orgueil… Il est mentalement aliéné à son maître et spirituellement aliéné aux esprits.
Si on ajoute à cela la consommation des substances maléficiées données par le maître lors des rituels et le port d’objets chargés également, l’emprise est totale et sur tous les plans :
physique (par les sens et les perceptions),
psychologique et émotionnel
et spirituel.
Le passeport parfait pour l’enfer qui a des apparences de passeport rapide pour le Paradis… Des faux papiers en somme sur lesquels ne sont même plus indiqués notre nom (on reçoit un nom lors de l’entrée dans la voie par lequel on sera ensuite exclusivement nommé ; le nom de baptême qui était le mien, n’existait plus…) et notre identité, perdus au fur et à mesure des rituels…