Mon ami Laurent Goutiere se lance dans un cours qui s’annonce passionnant d’histoire de la philosophie sur Youtube. Je ne connais pas de meilleur professeur. C’est donc une grande joie et une grande nouvelle. Certes il ne le fera pas directement pour l’IDA mais dans le cadre d’une chaîne YouTube qui s’appellera : « L’amour de la sagesse ». Cependant, il m’a fait l’honneur de pouvoir intégrer ses cours à la formation de l’IDA.
Laurent Gouttiere est né en 1962. Il a commencé à se passionner pour la philosophie dès sa jeunesse et a poursuivi aujourd’hui cette quête inlassable de la vérité, désirant ainsi mieux comprendre la personne humaine et la servir.
Qui est Laurent Gouttiere ? Un ancien Frère de Saint Jean, Marie-Dominique Gouttiere, condamné par la Congrégation pur la Doctrine de la Foi, et reconduit à l’état laïc.
Au cours des derniers mois, plus d’une douzaine d’interventions
d’évêques individuels ou de dicastères romains ont eu lieu pour
corriger, entretenir ou censurer diverses nouvelles fondations
communautaires, des mouvements ecclésiaux et la prélature de l’Opus
Dei. Il s’agit d’un signal important à ressentir non pas tant du
côté de la discipline, mais plutôt du côté de la vérification,
60 ans plus tard, de l’un des fruits importants de Vatican II.
Charisme,
gouvernance, abus et censures
Le phénomène des
nouvelles fondations et des mouvements ecclésiaux a été
particulièrement vif et luxuriant dans la période immédiatement
post-conciliaire, mais sa réception dans le corps global du peuple
de Dieu connaît les ajustements normaux de parcours chargés de
nouveauté, mais aussi exposés à des erreurs ou à des
incertitudes. Il est révélateur que dans les centaines de nouvelles
familles ecclésiales, il y a une quinzaine de fondateurs sous
surveillance et environ 80 instituts « commissariaux ». Les
interventions magistérielles peuvent être regroupées sous quatre
rubriques : charisme, gouvernance, abus et censures
théologico-liturgiques.
Chaque fondateur ou
fondatrice a sa propre compréhension originale de l’Évangile ou
d’une partie de celui-ci. Et c’est cette racine évangélique et
spirituelle qui donne une forme institutionnelle et un style de vie à
une fondation. Précisément parce qu’il s’agit d’un patrimoine
spirituel, il n’a pas la rigidité d’une définition juridique et
est confié à la mise en œuvre et au renouvellement des générations
qui suivent le fondateur. Il existe également un critère essentiel
pour la reconnaissance d’un charisme : » la capacité
d’une communauté, d’un institut à s’intégrer dans la vie du
peuple saint de Dieu pour le bien de tous » (François,
11 décembre 2021).
Du côté de la
gouvernance, on peut citer la lettre apostolique du 1er novembre
2021 (Authenticum charismatis), qui impose aux évêques de consulter
par écrit le dicastère des religieux avant une nouvelle fondation
religieuse. Une démarche similaire a été entreprise par le
dicastère des laïcs pour la reconnaissance diocésaine des
associations laïques.
On notera en
particulier le décret général que le dicastère des laïcs a
publié le 11 juin 2021. Elle prévoit une discipline commune
concernant le choix du modérateur ou président et de son conseil :
le choix requiert la participation, directe ou indirecte, de chaque
membre ; le mandat est de cinq ans (renouvelable une fois) ;
le fondateur peut rester plus longtemps mais avec l’autorisation du
dicastère.
La question des abus est une blessure qui traverse les nouvelles réalités ecclésiales et affecte toute l’Église. Elle ne se limite pas à la dénonciation des abus sexuels, mais à l’ensemble des actes indus concernant le pouvoir interne et l’influence sur les consciences. Les interventions visant des positions théologiquement incorrectes ou liturgiquement inacceptables sont plus rares.
Une femme " maltraitée " dans l'histoire du christianisme… et qui est aujourd'hui prise comme étendard par les sectes, les pseudo-thérapeutes et les groupes ésotériques. Luis Santamaría, membre du Réseau ibéro-américain pour l'étude des sectes (RIES) l'explique dans un article publié dans Portaluz, que nous reproduisons ci-dessous. (Traduit de l'espagnol par D. Auzenet, avec l'aide de Linguee).
Le 22 juillet, l'Église catholique célèbre la mémoire liturgique de Sainte Marie-Madeleine, l'un des personnages qui apparaissent dans les Évangiles en tant que disciple de Jésus. En 2016, le pape François a élevé cette mémoire au rang de "fête", soulignant ainsi le rôle important de ce disciple. Comme l'explique le décret publié par le Vatican à cette occasion, Marie-Madeleine, "appelée par saint Grégoire le Grand "témoin de la miséricorde divine" et par saint Thomas d'Aquin "l'apôtre des apôtres", peut aujourd'hui être proposée aux fidèles comme paradigme du service des femmes dans l'Église".
Une figure traditionnellement manipulée
Avec des mesures comme celle-ci, on tente de situer correctement l’un des principaux disciples de Jésus-Christ, après une histoire d’erreurs et de manipulations autour de sa figure. Comme on le sait d’après les textes évangéliques, elle était originaire de Magdala et est devenue chrétienne après que Jésus ait chassé d’elle sept démons. Elle a également été le premier témoin de la résurrection. La Bible ne contient guère d’autres informations à son sujet.
Cependant, elle a rapidement été identifiée à une autre femme non nommée dans l’Évangile : une pécheresse publique qui a lavé les pieds de Jésus avec ses larmes et les a essuyés avec ses cheveux, puis a versé sur eux un parfum coûteux. La tradition chrétienne l’a donc considérée comme une prostituée. Et il y a même eu une autre confusion dans le christianisme primitif, l’identifiant avec Sainte Marie Égyptienne, une ascète des IVe-Ve siècles, comme en témoigne l’iconographie, qui montre si souvent Madeleine comme une « pénitente ».
Bien que tout soit désormais clair au sujet de cette femme, l’ésotérisme contemporain l’exploite pour répandre des idées fausses sur l’identité et la mission de Jésus. Tout comme les anciens gnostiques proposaient parfois Marie-Madeleine comme dépositaire des enseignements secrets du Maître (il existe même un Évangile de Marie-Madeleine), divers groupes et auteurs de notre époque continuent de l’exploiter pour attirer, surtout, les femmes en quête spirituelle, en raison de l’attrait de sa silhouette.
Le féminin sacré, le Graal… encore le Da Vinci code ?
Ce n’est pas un hasard si les réseaux sociaux voient augmenter au mois de juillet les publicités payantes avec la revendication du disciple du Christ. L’un d’entre eux, très populaire, est celui du « Sommet de Magdala », qui, sous une apparence sérieuse et même académique, porte le sous-titre « Marie-Madeleine, du mythe à l’histoire » et qui se tiendra à Madrid (avec retransmission virtuelle, bien sûr). Il promet les recherches les plus récentes grâce à « une approche non ecclésiastique de la véritable figure de Marie-Madeleine et de son héritage ».
Mais une lecture approfondie révèle rapidement sa véritable orientation, en soulignant qu’elle montrera sa relation avec le Saint Graal, le symbolisme de son expulsion de sept démons (une allusion aux sept chakras ou centres d’énergie), si elle connaissait les plantes médicinales, son héritage chez les Cathares et les Mérovingiens… Toute une liste de thèmes communs à l’imaginaire ésotérique. « Une femme clé dans l’histoire de la spiritualité et du féminin sacré », peut-on lire. Ce qui confirme cette orientation clairement New Age, prête à attirer un public croyant et non croyant.
Le message sous-jacent n’est pas sans rappeler le roman Da Vinci Code (Dan Brown), qui a connu un grand succès en popularisant des idées ésotériques sur une prétendue descendance de Jésus et de Marie-Madeleine. Et il ne s’agit pas seulement d’une impression de lecteur, mais d’une accroche publicitaire expresse, comme on peut le voir sur le site web du sommet : « Si vous êtes de ceux pour qui le Da Vinci Code ne suffisait pas, voici l’occasion de découvrir une figure féminine, en avance sur son temps, qui a changé le monde ».
Elle se présente comme une thérapeute, coach et enseignante essénienne, et son site web explique qu' »en l’an 2020, Maravillas de Magdala fonde l’Université de la Conscience de la Sagesse Fleur de Lis, une Université pour l’âme et sans frontières ». Avec un langage d’auto-assistance, elle offre ses services en tant qu’enseignante spirituelle pour enseigner « la vérité sur le sens du monde », avec des réflexions telles que celle-ci :
« Ce qui arrive dans nos vies n’est ni bon ni mauvais… tout ce qui nous arrive sont des opportunités importantes d’apprentissage et d’amélioration qui nous conduisent à être la meilleure version de nous-mêmes et à prendre le contrôle de nos vies ».
Des doctrines aux pseudo-thérapies
L' »université » inventée par cette femme vise à « former un réseau mondial d’âmes, aidant la planète dans son processus d’ascension, où ensemble nous construirons une nouvelle ère, avec une nouvelle humanité éveillée et consciente ». À cette fin, elle diffuse des idées qui mélangent des éléments d’origines les plus diverses.
Dans son autobiographie, Maravillas de Magdala explique qu’on lui a diagnostiqué une fibromyalgie dans sa jeunesse et que, dans son désespoir, elle s’est tournée vers les thérapies alternatives les plus en vogue : « Naturopathie, homéopathie, constellations familiales, transgénérationnelles, bioévolution consciente et un long etc. Mais ce qui m’a fasciné et a complètement changé ma vie, c’est la Kabbale », confie-t-elle. C’est pourquoi, conclut-elle, « j’ai tout quitté pour me consacrer à mon véritable objectif qui est la Kabbale évolutive et la mettre au service du monde pour son évolution et sa guérison ».
Dans ce but de « guérison » et avec l’aide d’autres « thérapeutes », son entreprise – basée en Espagne – propose des formations à la kabbale, au tarot, à la connexion avec les anges, aux annales akashiques, aux runes, au Cours en Miracles… et des services de thérapie en ligne, auxquels on ne peut accéder qu’avec un mot de passe après avoir payé entre 55 et 195 euros.
Elle organise également des « voyages d’initiation » en Israël. Malgré leur ressemblance avec un banal pèlerinage en Terre Sainte – puisque les mêmes lieux sont visités – les activités menées sont loin d’être chrétiennes. Ce sont des méditations pour se connecter « à notre guide intérieur » (à Capharnaüm), « à l’énergie de Jésus » (sur le mont des Béatitudes), ou dans la ville de Magdala « une invocation à l’énergie féminine et à la communion sacrée entre hommes et femmes ».
De nombreuses autres propositions
Le commerce New Age inventé par la femme qui se fait appeler Merveilles de Magdala n’est pas la seule tentative actuelle de manipuler la figure de Marie-Madeleine dans un environnement ésotérique. Nous pourrions citer ici des dizaines d’exemples, et même davantage si nous élargissons le spectre géographique et linguistique.
Mais sans quitter le contexte hispanophone, une « psychothérapeute, écrivain et artiste » qui s’annonce également sur Facebook, Ángeles BlancoJuárez, a écrit une œuvre au double titre : Yo, María de Magdala y Orioto y El Hombre de los ojos de color Avellana (Moi, Marie de Magdala et Orioto et L’homme aux yeux noisette). Curieusement, l’auteur elle-même déclare que « ce n’est pas un livre documenté » et explique comment elle l’a écrit : « Je me suis connectée, par des états intérieurs très profonds, à tous les contenus que j’ai mis en mots ».
Et quel est son contenu ? Le résultat d’un événement prétendument extraordinaire : Ángeles Blanco « fait le lien avec l’être de Marie de Magdala (plus connue sous le nom de Marie-Madeleine), en racontant la merveilleuse transformation qu’a représentée pour cette femme l’entrée dans la vie de Jésus« . Et il tombe dans le cliché de la relation d’amour entre le Christ et son disciple, écrivant qu’« elle éveille en lui un amour inconditionnel pour Jésus en tant qu’homme et en tant qu’être qu’elle n’avait jamais ressenti auparavant pour personne d’autre ». Il raconte de manière parfaite comment ces deux personnes, ces deux êtres, se sont aimés ».
Des exemples comme ceux-ci nous montrent clairement deux choses. La première est que toute approche sérieuse de la figure de Marie-Madeleine doit se fonder fidèlement sur les textes bibliques et ceux de l’antiquité chrétienne, en tenant compte des méthodes éprouvées de la recherche historique. Et la deuxième leçon : méfiez-vous de nombreux individus et groupes qui se cachent derrière une Marie de Magdala composée sur un coup de tête pour attirer des adeptes et des fonds.
Voici une interview de Diane Vaughan. Cela concerne le crash de la navette spatiale Challenger en 1986 à Cap Canaveral.
Dans un livre important paru exactement dix ans après le crash, la sociologue états-unienne proposait une analyse très documentée de la banalisation du risque à la Nasa, qui avait conduit les ingénieurs à prendre des décisions mortelles.
A priori cela n’a rien à voir avec ce que vit l’Église actuellement.
Mais Diane Vaughan s’est aperçue que, comme tout le monde était au courant d’un dysfonctionnement depuis longtemps, c’était chose admise et on ne faisait rien. Ce fut la cause du crash.
L’idée c’est qu’il en est de même pour l’Eglise catholique : tout le monde, dans la hiérarchie était au courant des problèmes de pédocriminalité et de la façon de les régler en déplaçant les coupables et ça marchait ainsi.
Et puis vient un moment où c’est le crash planétaire : le système ne
fonctionne plus. Les victimes n’acceptent plus et c’est une crise
majeure.
L’analogie est très intéressante car elle est expliquée de façon
objective par une sociologue qui a conquis droit de cité après avoir
mené une remarquable enquête très approfondie qui a bluffé toute la
communauté scientifique. Elle est passée du diagnostic technique au
diagnostic sociologique.
Il nous faut également passer du discours théologique ou de droit canon à une explication du même ordre pour l’institution ecclésiale pour comprendre ce qui se passe, qui est quand même une crise majeure et sans véritable précédent.
Lorsque la CIASE parle du caractère « systémique » des violences sexuelles dans l’Eglise, elle « signifie qu’ayant eu connaissance d’un nombre récurrent d’abus en son sein, elle s’est généralement abstenue de prendre les mesures nécessaires pour les traiter de manière adéquate, c’est-à-dire y mettre fin ou les prévenir. C’est cette passivité prolongée qui engage la responsabilité de l’institution et autorise à parler d’un phénomène systémique.»
Télécharger le livret de Ludovic Gonfalon, qui développe cette analogie.