Spiritualité laïque et spiritualité chrétienne

« 63. La foi catholique de nombreux peuples se trouve aujourd’hui devant le défi de la prolifération de nouveaux mouvements religieux, quelques-uns tendant au fondamentalisme et d’autres qui semblent proposer une spiritualité sans Dieu[1]. »

Points de repères et de discernement

Définir en quelques mots ce qui relève de la spiritualité laïque est tout simplement impossible. Notre approche sera donc très partielle et aura pour point d’attention quelques éléments.

Tout d’abord, revenons à la définition et à l’étymologie. Spiritualité : ce qui concerne ici la spiritualité est relative à la vie spirituelle, à la vie de l’esprit. Cela peut aller de l’activité intellectuelle à la manière de pensée. En tous les cas, la racine latine est « spiritus. » Et il est intéressant de constater que cette même racine à donner respirer, inspirer, expirer. Comme si le souffle, la respiration, en lien avec l’air, l’élément le plus immatériel était l’interface entre le monde de la matière et le monde de l’esprit. D’ailleurs, le muscle le plus important de la respiration qui est au centre de notre corps, et qui forme le plancher de notre cage thoracique et le plafond de notre abdomen s’appelle le diaphragme ou, en langage médical, le « centre phrénique ». En grec phren veut dire, état d’âme, état d’esprit. C’est dire si les anciens avaient repéré qu’au centre de notre corps en lien avec la respiration, ce muscle était l’interface entre le soma, le corps et la psyché ou l’esprit. En français nous pouvons conjuguer le verbe expirer à la forme active j’expire, et non pas à la forme passive je suis expiré. Nous pouvons conjuguer le verbe inspirer à la forme active j’inspire, mais également à la forme passive, je suis inspiré. La question qui nous occupe ici est de savoir, qu’est-ce qui nous inspire ? Qui ou quoi nous inspire ?

Déjà, nous trouvons une différence essentielle entre l’Orient et la tradition judéo-chrétienne au sujet du souffle. En Orient, il s’agit de maîtriser l’énergie vitale qui circule dans le prana, comme le font les maîtres yogi par des exercices de pranayama ou yoga respiratoire. Le ki ou le chi des Chinois est cette énergie concentrée au centre de corps qu’il faut savoir maîtriser par des exercices ascétiques. Dans cette conception, le sommet de la vie spirituelle passera nécessairement par la maîtrise de ces énergies pour maîtriser son mental. Il s’agit de pratiques qui pourraient être considérées comme laïques, en ce sens qu’elles ne nécessitent pas de croyances particulières, mais une pratique assidue. Cependant si nous nous référons aux écrits ou paroles des maîtres nous constatons que tout un système de croyances y est attaché, une conception de l’homme et du monde, de la vie de la mort et de la vie après la mort sont indissociables des pratiques. Dans la Bible, le souffle « spiritus » en latin « pneuma » en grec et « rouah » en hébreux se reçoit de Dieu, il n’est donc pas maîtrisable. Cette simple remarque sur le souffle ou l’esprit permet d’envisager déjà des différences fondamentales quant aux différentes spiritualités.

Le mot laïc définit ce qui appartient au peuple et par conséquent qui n’appartient pas au clergé, ou bien qui est indépendant de toute opinion confessionnelle.

La spiritualité redevient à la mode, ou plutôt ce que l’on appelle l’expérience spirituelle, expérience spirituelle vécue sans lien nécessairement avec les religions traditionnelles, donc hors cadre institutionnel. Cette recherche est personnelle et rejette a priori tout cadre formel, toute interposition d’une église régulatrice authentifiant l’expérience. Il s’agit de trouver la source spirituelle par ses propres moyens, sans s’embarrasser ni de dogmes ni d’histoires. Cela peut être caractéristique d’une spiritualité laïque qui revendique autonomie et liberté intérieure. En positif, cette spiritualité ne fait allégeance à personne et par conséquent échapperait aux dérives sectaires. En négatif, l’expérience spirituelle personnelle n’ayant de compte à rendre qu’à elle-même, peut se perdre dans les dédales d’une subjectivité incontrôlée et incontrôlable.

La spiritualité laïque peut revêtir deux aspects selon qu’elle se situe dans une expérience d’intériorité, ou une expérience d’altérité, les deux n’étant ni contradictoires ni exclusives l’une de l’autre. L’expérience intérieure est d’un autre ordre qu’une démarche psychologique de type psychanalytique ou psychothérapeutique ou même de développement personnel. Il y a une recherche de silence, de solitude, de méditation qui n’est plus d’ordre psychologique, mais une plus intérieure, une recherche moins de l’expression que de l’impression de l’expérience. Cette intériorité n’est pas enfermement narcissique, elle peut au contraire favoriser une expérience d’altérité.

L’expérience de l’altérité qui est ouverture respectueuse au mystère de l’autre. Il s’agit également d’une ascèse qui m’oblige à ne pas réduire l’autre à mes champs conceptuels. Cette ascèse m’invite à l’étonnement. La démarche d’intériorité qui peut aboutir à une grande confiance en soi se heurte à la réalité de l’autre qui m’oblige, si je veux réellement le rencontrer, à un déplacement qui peut éroder ma propre cohérence. Ce décalage permis par la rencontre de l’autre est expérience d’altérité. Et il peut ouvrir précisément sur une autre perspective, celle de l’Altérité avec un grand A. La Bible ne cesse de relater cette inattendue au sein même de nos expériences humaines. Quelque chose de neuf, d’inimaginable advient. Et la réalité s’en trouve transfigurée, non pas changée, mais transfigurée.

Le Père des croyants Abram fait cette expérience de l’intériorité et de l’altérité quand il reçoit cette parole du Tout Autre : « lech lecha », qui se traduit va au plus loin de toi-même, et va vers toi-même.

Expériences de deux femmes qui se disaient laïques, Simone Weil et Etty Hilesum, qui traversant les drames du vingtième siècle, font l’expérience de Dieu en elle-même et dans l’autre.

L’expérience d’Etty Hillesum sera de l‘ordre de l’expérience intérieure.

« Cet après-midi, je me suis retrouvée tout à coup agenouillée sur la carpette brune de la salle de bains, la tête ensevelie dans mon peignoir qui traînait sur la chaise de rotin. Je ne suis pas capable de bien m’agenouiller, j’en ressens une sorte de gêne. Pourquoi ? Sans doute parce qu’il y a aussi en moi un penchant critique, rationaliste, voire athée. Et pourtant il y a en moi en même temps une profonde aspiration à m’agenouiller, les mains sur le visage et à trouver une paix profonde, en me mettant à l’écoute d’une source cachée au plus profond de moi-même.[2] »

L’expérience de l’altérité sera celle Simone Weil, dans ce qu’elle appellera « la descente de Dieu » : c’est Dieu le Tout Autre qui a pris l’initiative et qui est venu à sa rencontre prenant aussi la médiation de l’autre. « Remarquer que, dans l’Évangile, il n’est jamais question, sauf erreur d’une recherche de Dieu par l’homme. Dans toutes les paraboles, c’est le Christ qui cherche les hommes, ou bien le Père les fait amener par ses serviteurs. [3] »

Dans un cas comme dans l’autre, intériorité ou altérité, survient un moment non prémédité qui bouscule les certitudes premières et que la mystique chrétienne appelle « conversion ».

Être saint sans Dieu (cette formule provocatrice est celle d’un héros de Camus dans « La peste »). Tarrou veut savoir comment on devient « un saint sans Dieu ». L’homme devient tout d’un coup à travers les drames du vingtième siècle tout seul pour résoudre la question du sens.

Pour Luc Ferry et André Comte-Sponville dans leur livre « La sagesse des modernes », l’intériorité n’ouvre pas à la reconnaissance de l’Autre transcendant, au monde du divin, à un au-delà de l’homme, mais sur « l’absolu ici et maintenant, une transcendance dans l’immanence. » Dans la société sécularisée, la spiritualité laïque authentique selon Luc Ferry « s’est débarrassée de ses oripeaux théologiques ». Le divin s’humanise et l’humain se divinise. Par conséquent c’est à l’intérieur de l’homme – et non en dehors de lui ou au -delà de lui- que la transcendance peut être approchée. La société démocratique favorise le passage d’une transcendance verticale à une transcendance horizontale : en effet le sacré ne réside pas ailleurs que dans l’homme qui devient « l’homme-dieu ».

Luc Ferry repère dans la société contemporaine de nombreux signes qui expriment non seulement le caractère sacré de l’homme, mais aussi sa capacité au sacrifice pour le bien commun, notamment dans les formes d’engagement humanitaire au service de la vie de l’homme et du respect de sa dignité. « La liberté peut mériter que l’on risque sa vie pour elle. C’est cela la sacralisation de l’humain ! »

Cette spiritualité laïque veut se convertir au réel et entend se débarrasser de toute illusion. Il s’agit d’assumer la vie telle qu’elle est et non telle qu’on pourrait la rêver. Le sacré habite le quotidien et le moment présent. En cela André Comte-Sponville se rapproche de la sagesse bouddhiste.

Luc Ferry est fortement influencé par le kantisme et plaide en faveur « d’un humanisme transcendantal » selon lequel « il y a du sacré » en l’homme et d’une certaine manière du divin, c’est-à-dire des valeurs transcendantes et absolues. ». « L’humanisme transcendantal » désigne ici la position « hors nature » du propre de l’homme, dans la mesure où il échappe aux déterminismes qui régissent les phénomènes naturels. Pour Ferry, les sciences humaines ont trop tendance à réduire l’homme à des déterminismes bio socio historiques.

À l’inverse, Sponville se reconnaît davantage dans la tradition de la philosophie sceptique et matérialiste. André Comte-Sponville rejette le nihilisme pour lequel il n’y a ni permis ni défendu… Les notions de vérité ou de valeur s’inscrivent pour lui dans un nouveau « dogmatisme ». Il fait davantage confiance que Ferry aux sciences humaines et au contexte pour appréhender la condition humaine…

Ces deux philosophes pensent que c’est bien la primauté de l’amour et du respect de la vie qui donnent à la morale sa véritable signification, mais une morale libérée des illusions sécurisantes de l’espérance religieuse.

Mais Sponville se définit aussi comme un « athée fidèle » : athée parce que les religions révélées sont selon lui « un asile d’ignorance » et qu’il ne croit pas en Dieu ; fidèle parce qu’il reconnaît certaines valeurs intéressantes dans le judéo-christianisme, notamment dans la morale des Évangiles. Il affirme que l’on n’a pas besoin de croire en Dieu pour comprendre que l’amour et la compassion valent mieux que la haine. Ferry est sans doute plus proche du « personnalisme chrétien » de Mounier, en raison de son apologie d’une spiritualité de la personne, et de l’espérance, très éloignée donc de la dissolution de l’ego, chère au bouddhisme, et sans véritable espérance selon lui…

 Mais peut-il y avoir une spiritualité sans Dieu ?

Il ne s’agit pas d’être préalablement défiant ou critique face aux personnes qui cherchent en vérité un chemin d’intériorité, une meilleure relation à elle-même ou une meilleure relation aux autres dans une perspective altruiste. Elles peuvent faire bouger les chrétiens, les obliger à une attention renouveler à l’autre, au respect de cette quête d’authenticité intérieure.

Vatican II a mis l’accent sur le dialogue avec le monde, sur l’importance d’observer les « signes des temps » et d’y découvrir « ce que l’Esprit dit aux Églises ».

Une écoute bienveillante, une écoute gratuite sans désir de récupération est nécessaire. Une écoute avec ensuite le risque, quand cela est possible et avec douceur et bienveillance, d’une parole permettant de relire et de relier ce qui est dit avec sa propre expérience spirituelle, sa lecture de la Bible, avec l’exigence, si je demeure catholique, de rester fidèle à l’enseignement du magistère de l’Église. Ainsi ma propre subjectivité rejoint et adhère à la foi de l’Église et me garde de toute atomisation spirituelle, de tout subjectivisme. Cependant, voici quelques exemples qui sont symptomatiques d’une pratique qui se prétend laïque, mais est une forme de spiritualité déguisée qui peut entraîner loin d’une spiritualité chrétienne.

Frédéric Lenoir en est un des chantres

Ses livres et articles font l’apologie d’une spiritualité universelle et syncrétique transcendant toutes les spiritualités sans dogme ni théologie et par conséquent pouvant communier avec ferveur à une « spiritualité laïque ». Voici quelques extraits de son livre : « L’âme du monde » dont voici le thème : Un cataclysme planétaire est imminent, sept sages, un rabbin kabbaliste de New York, une chamane de Mongolie, un père moine catholique devenu ermite, une mystique hindoue, un vieux sage chinois, un musulman soufi du Nigeria, une philosophe néerlandaise maçonne, se retrouvent dans un monastère tibétain pour transmettre à un garçon et une fille adolescents, les clés de la sagesse universelle. « Loin des croyances dogmatiques, ils ouvrent un chemin simple et concret d’un humanisme spirituel qui aide à vivre[4] » Nous sommes avertis, Ma Amanda la philosophe maçonne lance le programme d’enseignement : « Alors je propose que l’enseignement que nous allons transmettre à ces enfants ne porte pas sur des croyances, mais sur l’attitude juste à avoir en cette vie pour la réussir, dans le sens le plus profond du terme.[5] » Et le soufi de répondre : « Je suis tout à fait d’accord. Laissons de côté les aspects théologiques et ritualistes qui distinguent nos traditions et ne gardons que les préceptes qui aident à vivre et à avancer sur le chemin spirituel. » Et le prêtre catholique de renchérir ; « Partons de notre expérience. Nous avons déjà pu constater qu’au-delà des dogmes et des rituels qui nous séparent, elle nous unit dans la recherche de la sagesse. »

Nous avons là l’esquisse d’une religion laïque universelle.

« Nul besoin de croire en Dieu ou en une quelconque divinité pour prier, pour remercier, pour demander, pour sentir son cœur vibrer à l’unisson du Cœur du monde. Toute parole, toute pensée, tout regard adressé à la force mystérieuse qui anime l’univers nous relie à l’Âme du monde et porte du fruit.[6]

Là, il s’agit de panthéisme, nous, chrétiens avons un choix radical à faire, nous ne pouvons rendre un culte à cette Âme du monde et à Dieu que Jésus nous a révélé comme notre Père.

« Et la force de nos croyances ira jusqu’à produire des évènements qui les confirmeront.[7] »

Monsieur Lenoir donne ici une définition de la pensée magique. Nous sommes aux antipodes de la révélation chrétienne.

Voici la finale de l’Évangile selon saint Marc 16, 14-20. « Enfin, il se manifesta aux onze eux-mêmes pendant qu’ils étaient à table : il leur reprocha leur manque de foi et la dureté de leurs cœurs parce qu’ils n’avaient pas cru ceux qui l’avaient contemplé ressuscité. Puis il leur dit : « Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile à toute la création. Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé ; celui qui refusera de croire sera condamné. Voici les signes qui accompagneront ceux qui deviendront croyants : en mon nom, ils expulseront les démons ; ils parleront en langues nouvelles ; ils prendront des serpents dans leurs mains et, s’ils boivent un poison mortel, il ne leur fera pas de mal ; ils imposeront les mains aux malades, et les malades s’en trouveront bien. » Le Seigneur Jésus, après leur avoir parlé, fut enlevé au ciel et s’assit à la droite de Dieu. Quant à eux, ils s’en allèrent proclamer partout l’Évangile. Le Seigneur travaillait avec eux et confirmait la Parole par les signes qui l’accompagnaient.

Il faut choisir radicalement, il n’y a pas d’alternative possible, entre notre foi en Jésus-Christ proclamé dans les Évangiles, et l’inversion de perspective, de cette bouillie conceptuelle d’un Frédéric Lenoir très à la mode aujourd’hui. Ce n’est pas la force de nos croyances qui ira jusqu’à produire des évènements qui les confirmeront, c’est notre adhésion de foi au Christ ressuscité et à sa Parole qui est suivi par des signes de la vérité de cette résurrection.

Mindfulness ou Méditation de pleine conscience

Bien que ceux qui promeuvent cette méditation affirment qu’elle est laïque, neutre et aconfessionnelle, la méditation de pleine conscience repose sur des fondements bouddhistes. La mindfulness ou méditation de pleine conscience est une méthode de méditation qui à la fois se réclame du bouddhisme et se prétend laïcisée et en dehors de tout contexte religieux.

Définition de la mindfulness selon l’Association pour le développement de la Mindfulness.

« La pleine conscience — mindfulness — signifie diriger son attention d’une certaine manière, c’est-à-dire : délibérément, au moment voulu, sans jugement de valeur » selon son fondateur Jon Kabat-Zinn[8]

La pleine conscience (parfois également appelée attention juste, samma-sati en pali, samyag-smriti en sanscrit1) est une expression dérivée de l’enseignement de Siddhartha Gautama et désignant la conscience vigilante de ses propres pensées, actions et motivations. Elle joue un rôle primordial dans le bouddhisme où il est affirmé que la pleine conscience est un facteur essentiel pour la libération (Bodhi ou éveil spirituel).

L’attention juste ou pleine conscience consiste à ramener son attention sur l’instant présent et à examiner les sensations qui se présentent à l’esprit, comment elles apparaissent, comment elles durent quelque temps, et comment elles disparaissent. Cette pratique permet de se rendre compte de façon directe si une sensation est quelquefois permanente ou bien toujours impermanente. Par la suite, le pratiquant va aussi examiner la matière, les perceptions, les habitudes mentales positives ou négatives, la conscience, comment toutes les choses apparaissent, comment elles durent et comment elles disparaissent. L’observateur reste neutre et silencieux (le « silence mental ») en examinant l’apparition et la disparition des sensations agréables, neutres ou désagréables, sans juger, sans chercher à retenir la sensation agréable ou à rejeter la sensation désagréable. L’observateur fait l’apprentissage du détachement et il se libère progressivement de la matière, de la sensation, de la perception, des conditionnements mentaux, de la conscience. Il acquiert la conviction que ce phénomène est toujours à double manifestation, joie et tristesse, donc « pas de satisfaction définitive ».[9]

C’est ainsi que l’attention à la respiration naturelle (anapana sati) : inspir, petite pause, expir, petite pause, n’est pas une fin en soi, mais elle soutient efficacement la vitalité de la pleine conscience.

D'autres articles sur la méditation de pleine conscience sur le site sosdiscernement.org

Le Bouddha conseille d’observer la sensation intérieurement (dans le mental) et extérieurement (dans le corps). Par exemple, si l’observateur voit dans le mental : « chaud », il peut voir aussi dans le corps : dilatation des vaisseaux sanguins, transpiration, etc. Ensuite, si l’observateur voit dans le mental : « froid », il peut voir aussi dans le corps : contraction des vaisseaux sanguins, grelottement, etc. Cette étape est importante, car le pratiquant apprend à voir de façon directe que le mental échange rapidement de nombreuses informations avec le corps par l’intermédiaire de l’inconscient. La pleine conscience expérimente le corps et l’esprit dans ses deux composants, conscient et inconscient, dans le but de tout nettoyer, de tout purifier.

La pleine conscience se situe au-delà de la première forme de sagesse : la dévotion, et au-delà de la deuxième forme : la logique de l’intellect. Elle est la troisième forme de sagesse, dite bhavana-maya panna, la vision directe de la réalité ultime en toute chose.

Ce n’est pas parce qu’elle s’affirme comme en dehors de tout contexte religieux que l’anthropologie qui sous-tend cette méditation est neutre. Elle se situe résolument dans la tradition bouddhiste et emprunte des termes et des techniques qui ne sont pas neutres. Cette méditation n’est pas dépourvue de ses éléments spirituels car c’est un chemin conduisant au bodhi ou éveil spirituel. Elle n’est donc pas laïque comme elle le prétend, mais avance masquée pour abuser de la confiance des gens et étendre son implantation.

Cette expansion se fait surtout sous couvert de certains résultats médico-scientifiques qui démontreraient des effets positifs de cette méditation sur le stress, l’anxiété, la dépression. Mais ces études, dites scientifiques reposent sur des études où le chercheur est partie prenante et parfois lui-même l’objet de la recherche. Pour certaines études, ceux qui étudient et évaluent les effets de cette mindfulness sont eux-mêmes des pratiquants de cette méditation. La méditation transcendantale en son temps présentait déjà des études scientifiques pour valider la méthode.

Un site canadien est particulièrement intéressant : il fait état de publications scientifiques, travaux et témoignages concernant les effets nocifs de la méditation ou de certaines autres pratiques néo-orientales[10]

Nous pouvons y trouver les références de quelques Articles scientifiques Krisanaprakornkit et al. (2009) and The Cochrane Library. : « La méditation est quelques fois considérée comme étant une forme de thérapie de relaxation, cependant la méditation ne créer pas seulement une relaxation, mais produit aussi un état altéré de conscience. […] la méditation peut causer la dépersonnalisation et la dé réalisation, et il y a plusieurs recherches sur l’association entre la méditation et les états psychotiques »

« Les chercheurs savent depuis 30 ans que la méditation peut avoir des effets néfastes sur la santé des gens, induisant des problèmes psychologiques et physiques allant des spasmes musculaires aux hallucinations. […] « Dr Michael Persinger, un psychologue à l’Université Laurentienne au Canada, a trouvé en 1993 que la méditation induit des convulsions cérébrales semblables à l’épilepsie chez certaines personnes. »

La joie de l’Evangile

Aujourd’hui comme hier, nous sommes attirés par ce qui semble nouveau, nous pensons découvrir des chemins inédits. Un vieux Père Abbé d’un monastère bénédictin disait : « En matière d’hérésie tout a déjà été inventé. »

Le Pape François dans son exhortation apostolique « La joie de l’Évangile » parle de mondanité spirituelle qui peut toucher les chrétiens et leur faire perdre la joie et la simplicité évangélique. Il pointe deux manières d’alimenter cette mondanité spirituelle. La première est l’attrait du gnosticisme où l’on pense que l’initiation donne accès à la connaissance suprême des mystères de la vie. (Voir sur ce même site PNCDS 72 : parcours initiatiques, Rose-Croix, francs-maçons… comparaisons et divergences avec la spiritualité chrétienne.) La seconde est le néo pélagianisme où l’on croit pouvoir se sauver par ses propres forces et ses propres mérites. Les deux étant liés l’une à l’autre dans un même orgueil de croire que l’on peut se passer de Dieu Créateur et Sauveur.

Voici cet extrait de La joie de l’Evangile du Pape François : 

Non à la mondanité spirituelle

  1. Cette mondanité peut s’alimenter spécialement de deux manières profondément liées entre elles. L’une est l’attrait du gnosticisme, une foi renfermée dans le subjectivisme, où seule compte une expérience déterminée ou une série de raisonnements et de connaissances que l’on considère comme pouvant réconforter et éclairer, mais où le sujet reste en définitive fermé dans l’immanence de sa propre raison ou de ses sentiments. L’autre est le néo-pélagianisme autoréférentiel et prométhéen de ceux qui, en définitive, font confiance uniquement à leurs propres forces et se sentent supérieurs aux autres parce qu’ils observent des normes déterminées ou parce qu’ils sont inébranlablement fidèles à un certain style catholique justement propre au passé… dans les deux cas, ni Jésus-Christ, ni les autres n’intéressent vraiment. Ce sont les manifestations d’un immanentisme anthropocentrique…
  2. La joie de l’Évangile remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus. Ceux qui se laissent sauver par lui sont libérés du péché, de la tristesse, du vide intérieur, de l’isolement. Avec Jésus Christ, la joie naît et renaît toujours.

Une joie qui se renouvelle et se communique

  1. Le grand risque du monde d’aujourd’hui, avec son offre de consommation multiple et écrasante, est une tristesse individualiste qui vient du cœur bien installé et avare, de la recherche malade de plaisirs superficiels, de la conscience isolée. Quand la vie intérieure se ferme sur ses propres intérêts, il n’y a plus de place pour les autres, les pauvres n’entrent plus, on n’écoute plus la voix de Dieu, on ne jouit plus de la douce joie de son amour, l’enthousiasme de faire le bien ne palpite plus. Même les croyants courent ce risque, certain et permanent. Beaucoup y succombent et se transforment en personnes vexées, mécontentes, sans vie. Ce n’est pas le choix d’une vie digne et pleine, ce n’est pas le désir de Dieu pour nous, ce n’est pas la vie dans l’Esprit qui jaillit du cœur du Christ ressuscité.

  2. J’invite chaque chrétien, en quelque lieu et situation où il se trouve, à renouveler aujourd’hui même sa rencontre personnelle avec Jésus Christ ou, au moins, à prendre la décision de se laisser rencontrer par lui, de le chercher chaque jour sans cesse. Il n’y a pas de motif pour lequel quelqu’un puisse penser que cette invitation n’est pas pour lui, parce que ‘personne n’est exclu de la joie que nous apporte le Seigneur’. Celui qui risque, le Seigneur ne le déçoit pas, et quand quelqu’un fait un petit pas vers Jésus, il découvre que celui-ci attendait déjà sa venue à bras ouverts. C’est le moment pour dire à Jésus Christ : ‘Seigneur, je me suis laissé tromper, de mille manières j’ai fui ton amour, cependant je suis ici une fois encore pour renouveler mon alliance avec toi. J’ai besoin de toi. Rachète-moi de, Seigneur, accepte-moi encore une fois entre tes bras rédempteurs’. Cela nous fait tant de bien de revenir à lui quand nous nous sommes perdus ! J’insiste encore une fois : Dieu ne se fatigue jamais de pardonner, c’est nous qui nous fatiguons de demander sa miséricorde.[11]

Bertran Chaudet, 2014

Notes

[1] EXHORTATION APOSTOLIQUE EVANGELII GAUDIUM DU PAPE FRANÇOIS, AUX ÉVÊQUES AUX PRÊTRES ET AUX DIACRES AUX PERSONNES CONSACRÉES ET À TOUS LES FIDÈLES LAÏCS SUR L’ANNONCE DE L’ÉVANGILE DANS LE MONDE D’AUJOURD’HUI

[2] Cité par Paul Lebeau, Etty Hillesum, un itinéraire spirituel, Namur/Bruxelles, Fidélité/Racine, 1998, p. 89

[3] Intuitions pré chrétiennes, Éd. du Vieux Colombier, 1951

[4] Frédéric Lenoir. L’âme du monde. Ed NiL. Juin 2012

[5] Ib.p.51.

[6] Ib.p.149.

[7] Ib.p.161.

[8] http://www.association-mindfulness.org/definition-mindfulness.php

[9] Extrait de ce site : http://fr.wikipedia.org/wiki/Pleine_conscience

[10] http://dangeryoga.blogspot.fr/

[11] EXHORTATION APOSTOLIQUE EVANGELII GAUDIUM DU PAPE FRANÇOIS AUX ÉVÊQUES AUX PRÊTRES ET AUX DIACRES AUX PERSONNES CONSACRÉES, ET À TOUS LES FIDÈLES LAÏCS SUR L’ANNONCE DE L’ÉVANGILE DANS LE MONDE D’AUJOURD’HUI

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