Avec Jean-Christophe Thibaut, Adrien Bouhours, et Guillaume-François Salin. Émission En quête d’esprit du 21 avril 2024, en replay.
Étiquette : Nouvelles spiritualités
Yoga, chamanisme, sorcellerie… Êtes-vous ouvert aux nouvelles spiritualités
Un article de Damien Karbovnik, sociologue et historien des religions
Fabriquer ses propres croyances pour se distinguer de celles de sa famille, ériger la phrase « prendre du temps pour soi » en nouveau mantra, remplacer la religion par du développement personnel : le monde spirituel est-il devenu un objet de consommation comme les autres ? Pour beaucoup d’individus devenus adultes au tournant de l’an 2000, les conséquences de l’individualisme et du néolibéralisme ont eu aussi un impact sur leur rapport à la spiritualité.
Avez-vous déjà essayé le puppy yoga ou le yoga wine, déclinaisons les plus récentes et les plus branchées d’un yoga sans cesse réinventé ? À moins que vous ne soyez davantage tenté par une « retraite spirituelle laïque » ? Ou alors avez-vous ressenti en vous l’appel de votre « sorcière intérieure » ? Mais peut-être êtes-vous plutôt « appli de méditation » ?
La « révolution spirituelle », constatée dès les années 1990 par les sociologues Paul Heelas et Linda Woodhead, semble plus que jamais en marche et ne cesse de gagner en ampleur.
Dans les librairies, les rayons qui sont dédiés à la spiritualité ne font que croître et absorbent ceux dédiés à la religion, au bien-être, au développement personnel ou même à l’ésotérisme.
Associée à de multiples croyances et pratiques – du chamanisme à l’écologie en passant par la sorcellerie – la notion de « spiritualité » a le vent en poupe et de plus en plus de personnes se définissent grâce à elle, afin de mieux se distinguer de la religion. Que cherche-t-on à exprimer aujourd’hui par ce terme ? Pourquoi l’oppose-t-on à la religion ?
La difficulté à définir la spiritualité se dissipe en partie lorsqu’on la met en rapport avec le contexte de notre modernité tardive, période contemporaine déterminée par l’accélération technologique, notamment, en suivant le philosophe Harmut Rosa. Plus souple que la religion, il convient de comprendre la « spiritualité moderne » comme une multitude de systèmes individualisés, en permanente évolution et animée par une quête de sens et d’épanouissement personnel.
En filigrane, dans ces nouvelles spiritualités, s’observent aussi les conséquences de l’individualisme et du néolibéralisme, autant dans le rapport qu’ont les individus avec que dans l’idéologie qui les anime.