Aventures et mésaventures du bien-être

Diffusé le 01/11/2023 à 22h48 Disponible jusqu’au 09/05/2024

Dans une société standardisée, parfois hostile et souvent indifférente, il est des souffrances impossibles à apaiser, qui font prospérer des solutions de bien-être qui proposent du sens autant que des remèdes.

Ce monde du bien-être est le creuset de nouvelles croyances, qui défient la raison et la science, et ouvrent la porte aux charlatans et aux manipulateurs.

Gérard Miller s’intéresse à toutes ces pratiques avec la curiosité attentive de Spinoza, qui disait :  » Ne pas se moquer, ne pas déplorer, ne pas détester, mais comprendre.  » Une plongée dans un univers alternatif qui révèle tout le désarroi et la violence sourde des sociétés contemporaines.

Réalisé par : Gérard Miller, Anaïs Feuillette

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L’expérience spirituelle chrétienne est une histoire d’amour

Entretien. Le père Dominique Salin, jésuite, théologien et historien de la spiritualité, analyse les différences entre le développement personnel et le Salut chrétien. Recueilli par Florence Chatel, site de La Croix

La Croix : Quelle différence y a-t-il entre le bien-être du développement personnel et le Salut annoncé par le christianisme ?

Père Dominique Salin : L’expérience spirituelle chrétienne, qui consiste à s’engager à la suite de Jésus, n’est ni une affaire de bien-être ou de mieux-être, ni tellement une question d’être sauvé ou pas. C’est une histoire d’amour. Elle ne se décide pas comme d’aller voir un sophrologue.

Spiritualité : quand Dieu nous repose

L’amour vous tombe dessus brutalement par un coup de foudre ou vient progressivement. Que ce soit celle du catéchumène ou d’une grande mystique comme Thérèse d’Avila, l’expérience spirituelle chrétienne est donc une affaire de passivité et d’attirance : on ne peut pas ne pas aimer Jésus, vivre de son esprit, essayer de l’imiter…

Qu’est-ce que le Salut ?

Père D. S. : L’expérience du Salut commence par un cri, « SOS, je me noie ! » C’est une question de vie ou de mort. Pour un chrétien, être sauvé signifie que la mort cesse d’être le dernier mot de la vie. Le cœur de la foi chrétienne, le kérygme, c’est le Christ ressuscité, et chacun est promis à ressusciter comme lui, avec lui. Mais dans la réalité, la plupart des chrétiens ne sont pas chrétiens parce qu’ils veulent être sauvés de la mort.

On entend pourtant des personnes dire, quand elles ont été tirées d’une épreuve, qu’elles ont été sauvées…

Père D. S. : C’est vrai, la personne dit : « J’ai été sauvée, je ne suis pas seule. Il y a de l’autre dans ma vie : l’Esprit saint, l’Esprit de Jésus, Dieu… » C’est ça la foi. À la différence du développement personnel où l’on cherche à parvenir à une meilleure maîtrise de soi par des techniques, dans l’expérience du Salut, du compagnonnage avec Jésus de Nazareth, on expérimente que des choses nous échappent, que nous ne comprenons pas tout dans notre vie.

Les demandes de bien-être et de bonheur sont légitimes. Que propose Jésus au regard de cela ?

Père D. S. : Jésus propose la joie, a fortiori à tous ceux qui sont accablés et croulent sous le fardeau. Je connais des personnes qui sont de vrais disciples de Jésus et qui vivent de grandes épreuves physiques ou affectives. Elles ont une espèce de sagesse, de détachement par rapport à leur souffrance, à leur manque. Ce sont des saints.

Quête de soi, nouvelles pratiques… Qui sont les « nouveaux spirituels » d’aujourd’hui ?

Regardez Thérèse de Lisieux dans les dix-huit derniers mois de sa vie. Alors qu’elle vit une nuit de la foi terrible, toutes les carmélites lui disent qu’elle a un heureux caractère, qu’elle est toujours gaie. Thérèse écrit  : « Si elles savaient »

Dans le développement personnel, la demande est individuelle. La question du Salut n’est-elle pas collective ? Le Christ sauve l’humanité.

Père D. S. : Oui et d’ailleurs, chaque dimanche à la messe, nous disons dans un article du Credo : « Je crois à la communion des saints. » C’est-à-dire que nous croyons à une solidarité des vivants, et à une solidarité des vivants et des morts. Nous, les chrétiens, ne sommes pas seuls. Il y a le Christ avec nous et nos frères humains.

Le Salut par la guérison des corps

Même ceux que nous n’aimons pas beaucoup, nous sommes solidaires d’eux parce que nous croyons que nous sommes tous image de Dieu. Tout homme, même le plus grand criminel, porte au fond de lui l’image du Christ recouverte par la rouille des mauvaises habitudes. Être sauvé, c’est accepter cette réalité que nous sommes tous aimés et enfants de Dieu. C’est pouvoir dire oui à la Vie.

Les dérives du bien-être à l’école

Comment réduire le stress à l’école en misant sur le bien-être de ses acteurs, tout en restant compatible avec une certaine anthropologie chrétienne ?

Certains pensent avoir trouvé la solution miracle grâce à des techniques de relaxations grâce à des intervenants extérieurs qui ne sont pas toujours à la hauteur du professionnalisme qu’ils affichent. Sur le site de RCF.

Gare aux charlatans

Aujourd’hui, le développement du bien-être est partout : dans les entreprises, les hôpitaux, les universités. Et il vient juste d’arriver sur les bancs de l’école primaire. La question n’est pas vraiment de savoir si un gong tibétin ou quelques mouvements de yoga sont efficaces, l’enjeu est surtout d’identifier à quels intervenants on décide de confier le développement du bien-être dans les écoles. Car il s’agit de mineurs.

Georges Fenech, ancien député, et ancien magistrat n’y va pas par quatre chemins. Il sort actuellement un livre intitulé « Gare aux gourous » (éd. du Rocher). Pour lui, la prudence s’impose car certains sont des « charlatans ». Des imposteurs qui tirent profit d’un business juteux en proposant des séances contre le stress ou la violence scolaire à un public fragile. 

Un manque d’esprit critique

Il ne s’agit évidemment pas de mettre tout le monde dans le même panier. Mais le CAFFES, le Centre national d’Accompagnement Familial Face à l’Emprise Sectaire et sa présidente Charline Delporte s’interrogent sur l’influence sur le long terme de ces séances de bien-être dans une école. 

Une tendance qui concerne également les écoles privées catholiques, qui manqueraient parfois d’esprit critique. Les établissements publics repèrent dans ces techniques une version du bouddhisme et donc l’expression d’une religion, incompatible avec la laicité. De leur côté, les écoles privées catholiques souligne le développement de l’intériorité. Mais derrière chaque technique, il y a une philosophie. C’est ce que résume Didier Pachoud, président du GEMPPI, le Groupe d’Etude des Mouvements de Pensée en vue de la Protection de l’Individu,  qui travaille depuis 30 ans sur les dérives sectaires ou thérapeutiques.

Des méthodes incompatibles avec l’anthropologie chrétienne

En y regardant de plus près, certaines méthodes sont en réalité, absolument incompatibles avec l’anthropologie chrétienne. Bertrand Chaudet est diacre permanent, ancien kiné, il consacre ses réflexions à ce qui sous-tend les nouvelles thérapies et les méthodes de développement personnel sur le site sos discernement. Il appelle aujourd’hui les directeurs des établissements scolaires à davantage de clairvoyance. Car une invitation à un moi plus fort sonne mal avec l’humilité à laquelle invite le Christ dans la religion catholique.

Il y en a un autre qui ne mâche pas ses mots quant à ce genre de pratiques. C’est le père Guy Gilbert. Pour lui, quand de l’argent et des heures sont consacrées à la méditation pleine conscience, se pose la question de ce que les écoles catholiques font de leur liberté. Il invite aujourd’hui les écoles, et les familles, à un véritable sursaut.

Méditation à l’école : pourquoi la Ligue des droits de l’homme la trouve dangereuse ?

Vous avez dit : holistique ?

Un peu de vocabulaire

L’HOLISME (du grec holos, totalité) est une doctrine qui considère les phénomènes comme des totalités. Le mot qualifie la démarche par laquelle on regarde un phénomène, un objet, comme constituant un tout. L’holisme est donc une approche de l’être humain qui va trouver un point d’application essentiellement dans le domaine médical (où une spécialisation à outrance risque de faire oublier qu’un patient ne peut pas se découper en secteurs indépendants les uns des autres).

Cependant, le désir d’atteindre les réalités dans leur globalité, comme un tout, se retrouve aussi dans le domaine spirituel puisque l’homme est considéré comme ayant deux dimensions — spirituelle et psychique — l’âme, psuchè, étant justement ce que les psychiatres cherchent à guérir. Ainsi un individu holistique est considéré comme une globalité où tout fait corps, il est un tout qu’il ne faut pas compartimenter.

Comme il est mentionné sur un site internet, le holisme veut dire que l’homme est un tout : un corps (physique), une âme (mental, émotion), un esprit (cœur, souffle de vie). Le travail se fait sur la globalité de l’être

Mais la préoccupation holistique, qui a le mérite d’interroger sur l’urgence de prendre en compte l’unité de la personne, conduit paradoxalement à la confusion, car il n’y a plus de distinction entre l’ontologique, le théologal, le psychologique, le spirituel, etc. ; la distinction des ordres, au sens pascalien du terme, a disparu. L’holisme est un système de pensée — on pourrait dire : une idéologie — réducteur. Tout est confondu et inclus dans un ordre homogène et indifférencié.

Par ailleurs, on retrouve le mot holos dans CATHOLIQUE, Kat’holon voulant dire « selon le tout, la totalité ». Mais là, c’est le Mystère de la foi qui donne forme à l’Église et la structure, et qui par conséquent donne sa forme propre à la lecture de l’Écriture et à la vie chrétienne ; et donc aussi à la morale et à la mystique, à la spiritualité comme on dit couramment. « Catholique » implique la référence à une source qui nous précède. Ce principe qui rassemble organiquement le tout de la Révélation est méconnu par l’holisme, qui regarde les phénomènes comme un grand tout indifférencié.

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Nouvel Age — 5. Les nouveaux paramètres

Développer l’intuition, pas la raison

La nouvelle éducation doit mettre l’accent sur le développement d’une sensibilité intuitive dans laquelle réside la synthèse de notre intelligence pensante, de notre mémoire, de notre créativité et, bien sûr, de tout le monde sensible aux émotions qui repose dans notre corporéité

Il ne s’agit pas de savoir ce en quoi vous pensez ou en quoi vous croyez, mais ce que vous vivez et ce que vous ressentez intuitivement. Eh bien, plus vous aurez de canaux et d’expériences riches, plus vous assimilerez intuitivement tout ce qui a été et continue d’être dans notre essence en tant qu’êtres humains.

L’Âge de la Raison avec ses mentalismes et sa logique reste comme une partie de l’Ère précédente. La connaissance des sciences et de la formation conceptuelle des valeurs et des croyances, fera place à cette nouvelle façon de vivre basée sur le développement de l’intuition immédiate de tout ce qui peut être vécu.

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